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Commanderie de Garidech (T)

Département: Haute-Garonne, Arrondissement: Toulouse, Canton: Gragnague - 31

Domus Hospitalis Garidech
Domus Hospitalis Garidech

§ I. — Garidech
Située sur la route de Toulouse à Albi, cette ancienne commanderie de l’Ordre de Saint-Jean ne peut présenter comme vestige de son passé, que son église à l’aspect original et sévère dont la façade imposante arrête forcément, malgré l’absence complète d’ornementation, l’attention du voyageur, et ses vieilles archives qui viennent nous raconter ce qu’elle fut jadis. En interrogeant ces dernières, nous n’avons pu découvrir la date de la donation de Garidech à l’Ordre de l’Hôpital. Mais dans les liasses des chartes se rapportant à la maison de Toulouse, nous avons trouvé un vieux parchemin, dans lequel il est dit : que le douzième jour des calendes d’octobre (20 septembre) de l’année 1134, Pierre Aguassa et Raymond son frère donnèrent à l’Hôpital Saint-Jean de Toulouse, au Prieur Bernard Hugo, leur portion du dîmaire de l’église de Saint-Pierre-de-Salinières, bâtie dans le pays toulousain (in pago tolosano), sur les bords du Girou (1). Or, cette église, disparue depuis longtemps, a laissé son nom a une partie du territoire de Garidech, où elle se trouvait située. Cette possession isolée constitua une dépendance de la maison de Toulouse, jusqu’à ce que, s’étant successivement augmentée des dîmaires des églises de Garidech et de Saint-
1. Pièces justificatives n° XX.

Bibian, situées dans le voisinage, elle eût acquis une importance assez considérable, pour pouvoir être érigée en commanderie séparée ; ce qui eut lieu vers le milieu du XIIIe siècle. Cette nouvelle situation eut pour résultat immédiat d’accroître rapidement la prospérité de l’Hôpital de Garidech, et, à partir de ce moment, les archives contiennent un nombre considérable de donations plus ou moins importantes faites par les fidèles de la contrée.
Mais cette prospérité même suscita à l’établissement des chevaliers les difficultés qui en ôtaient les conséquences habituelles. Chez plusieurs, la jalousie ne tarda guère à succéder à la sympathie primitive envers cette maison, dont l’accroissement commençait à leur inspirer de l’ombrage. À la tête des adversaires déclarés des Hospitaliers, se trouvaient Bon Mancip de Maurand et Bertrand son fils, dont les vastes fiefs confinaient aux terres de l’Hôpital. Vers l’année 1260, la guerre était ouvertement déclarée entre les deux partis et les épées même étaient tirées des fourreaux. Ecoutons les récits que font successivement les deux rivaux au frère Raymond d’Aure, précepteur de Raineville et Vice-Prieur du Toulousain, choisi par eux comme arbitre de leur querelle. Chaque combattant vient vanter sa modération, énumérer avec complaisance les blessures reçues, les insultes et les menaces prodiguées par le parti opposé.
Laissons d’abord parler le précepteur, frère Bernard de Caminièrcs. Il venait, dit-il, de faire porter dans la cour de l’Hôpital les gerbes de la moisson, lorsque Bertrand de Maurand v fît irruption, à la tête de ses complices : Terrasson, Bérenger Raymond, damoiseau, Pierre de Grazac, Armand de Valségur, Raymond Vitalis et une foule d’autres, armés jusqu’aux dents. Les envahisseurs enlèvent les gerbes et s’éloignent en insultant et menaçant le commandeur et les Hospitaliers. Ceux-ci s’arment à la hâte et se mettent à la poursuite des ravisseurs. Le combat s’engage : Bertrand de Maurand se jette sur le-commandeur, le menaçant de sa lance et brise le frein de son palefroi. Le chapelain Raymond, que son caractère sacré n’a pas retenu loin de la mêlée, est frappé d’un coup d’arbalète et renversé sans connaissance ; il reçoit plusieurs coups de massue, pendant que Bertrand de Maurand ne cesse de crier : Qu’il meure ! qu’il meure ! Le précepteur continue en faisant voir tous les siens sortant du champ de bataille plus ou moins écloppés et réclame pour chacun d’eux, des satisfactions pécuniaires. D’après Bertrand de Maurand au contraire, le commandeur est venu assaillir ses gens à la tête d’une troupe, armée de lances, d’arbalètes, de bâtons, do poignards et d’épées ; à plusieurs reprises, il les aurait dispersés et maltraités de mille manières ; dans cette seconde narration, nous voyons le chapelain Raymond précipitant ses ennemis dans le Giron et le précepteur se jetant sur Bon Mancip de Maurand et le désarçonnant.
La sentence arbitrale fut rendue le 14 août 1265, par Pierre du Port précepteur de Saint-Sulpice, qui avait remplacé Raymond d’Aure dans la charge de vice-prieur du Toulousain. Il ordonna que les Hospitaliers continueraient à posséder les terres, objet de la discussion et qu’ils paieraient 460 sols toisas de compensation à leurs adversaires ; quant aux injures et aux voies de fait, trouvant sans doute que les torts étaient partagés des deux côtés, l’arbitre décida qu’elles seraient oubliées eu remises de part et d’autre et qu’elles ne se renouvelleraient plus (2). Cette sentence rétablit la paix entre les doux rivaux, qui vécurent dans la suite en bonne intelligence ; nous en trouverons la preuve dans certaines cessions de terre faites par ce même Bon Mancip de Maurand au précepteur B. de Camimières (1275) (3).
2. Archives de Garidech, L. II.
3. Archives de Garidech, L. I.


Lors de l’enquête ordonnée par le roi de France, pour le rétablissement des droits de la couronne dans ses nouvelles provinces du Midi, son procureur Gille Caumel ou (Camelin) contesta au frère Raymond d’Aure, précepteur de Garidech, le droit d’exercer dans cette ville et son territoire, la haute et moyenne justice ; ce droit, il le revendiquait pour l’autorité royale, prétendant que Garidech, ayant dépendu de tout temps du baillage et de la châtellenie de Buzet, la haute seigneurie en appartenait aux comtes de Toulouse et devait par suite revenir aux rois de France. Le chevalier de Saint-Jean affirmait, au contraire, que ce droit avait été exercé de temps immémorial par son ordre, qu’il existait encore à Garidech la hache et les chaînes pour l’exercice de la haute justice et que de plus ses prédécesseurs et lui avaient toujours institué les consuls de cette ville ; il appuyait son dire par le relevé des causes qui avaient ôté portées depuis un certain nombre d’années devant le tribunal des Hospitaliers et des condamnations prononcées contre les coupables, et exécutées par les officiers du commandeur dans le fort môme de Garidech. La fin du parchemin ayant été enlevée nous ne connaissons pas la sentence rendue par les commissaires. Il est toutefois probable que ceux-ci se rendirent aux raisons présentées par le procureur du roi, car les documents postérieurs nous montrent les commandeurs de Garidech jouissant simplement de la seigneurie spirituelle et foncière de cette ville et de ses dépendances (4).

Les premières années du XVe siècle virent la commanderie de Garidech accroître singulièrement son importance. Comme nous le verrons plus loin, à la demande du Grand-Prieur de Toulouse, Raymond de Lescure, le Grand-Maître, Philibert de Naillac, autorisa, par une bulle du 24 novembre 1408, la transformation de l’ancienne maison du Temple de Toulouse en un hôpital destiné aux pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Pour subvenir aux frais de cet établissement le Grand-Maître lui affecta les revenus de Garidech et en déclara le précepteur, Hospitalier du Temple ; l’élection de ce dernier appartenait, d’après cette même bulle, aux Grands-Prieurs de Toulouse assistés de leur Chapitre Provincial. Outre les frais d’entretien de l’hôpital, le commandeur de Garidech était obligé de payer annuellement ses responsions au trésor de l’Ordre, d’assez fortes charges particulières à sa circonscription, plus 25 quartons de froment fournis à la Chambre Prieurale de Toulouse (5). Aussi, pour le mettre en état de faire face à toutes ces dépenses, adjoignit-on à cette commanderie celle de Cornebarrieu et dans la suite quelques petits domaines de l’Ordre dans les environs de Montauban.
4. Archives de Garidech, L. VIII.
5. Archives de Garidech, L I.


Dans le courant du XVIe siècle, nous assistons à la construction de l’église de Garidech. Ce fut en 1522 que le commandeur Melchior d’Aspremont conclut, à cet effet, un traité avec Louis Privât, maître-maçon juré de la ville de Toulouse, qui se chargea de construire ce bâtiment dans le délai de trente-cinq ans ; le chevalier s’engagea à y consacrer le tiers de la dîme. Au mois de janvier 1534, l’édifice était assez avancé pour pouvoir être consacré ; il le fut par Révérendissime George de Selve, évêque de Lavaur, remplaçant pour la circonstance le cardinal Odon de Chastillon, archevêque nommé au siège de Toulouse. Mais à partir de cette époque, le zèle se ralentit ; le commandeur ne paya plus sa part des frais qu’avec répugnance ; il fallut même, pour la vaincre, l’intervention du sénéchal de Toulouse, réclamée par les consuls et le syndic de la communauté de Garidech. Par suite de ces difficultés, l’église ne fut entièrement terminée qu’en l’année 1557.

Bientôt après cotte époque, la petite ville de Garidech eut à subir sa part de désastres et de dévastations pendant la cruelle période des guerres religieuses ; dans cet épisode militaire, faillit périr l’église nouvellement construite. Voici en effet ce que nous lisons dans le procès-verbal d’une visite pastorale faite le 26 septembre 1596, par maître Chabanne archiprêtre de Montastruc, délégué du cardinal de Joyeuse.
« Le Sainct-Sacrement y soloit estre réservé au milieu du grant autel dans un petit tabernacle, qui fut rompeu et destruit parles Réistres... Le baptistère est sans couvert, sans pavillon et ce qui est bien pis, sans couverture de toit, de sorte qu’il y pleust en dedans. »
Dom Vaissette nous apprend en effet que, dans la période précédente, la contrée avait été dévastée par les protestants. Nous lisons dans son histoire que les princes de Navarre et de Condé partirent de Montauban, à la tête des Reitres, s’avancèrent vers la Garonne, campèrent le 22 septembre 1570 à la Bastide-Saint-Sernin, et s’étendirent ensuite dans les environs de cette localité, portant partout le fer et le feu. Or, Garidech n’étant éloigné de la Bastide-Saint-Sernin que de quelques kilomètres, on est autorisé à conclure que ce fut alors qu’eût lieu la dévastation, dont on constatait encore les traces, vingt ans plus tard ; les malheurs de la guerre n’avaient pas encore permis de la réparer. Ce long abandon est d’autant plus explicable que les environs furent, dans cet intervalle, le théâtre de luttes sanglantes ; car en 1590, nous voyons dans le voisinage de Garidech la place de Montastruc, successivement prise et perdue par les troupes catholiques commandées par Scipion de Joueuse (6). Du reste les murailles de la ville, fort peu considérables par elles-mêmes, ne durent pas présenter de bien sérieux obstacles aux envahisseurs. Ces derniers furent pourtant obligés d’employer l’artillerie, pour en venir à bout. Du passage dévastateur des Reîtres, il ne reste plus aujourd’hui de vestiges, sauf quelques traces de projectiles sur de vieilles murailles et dans la sacristie de l’Eglise, un boulet lancé jadis par une couleuvrine des Huguenots et transformé depuis en un pacifique pilon pour écraser l’encens.

Nous n’avons plus à mentionner, avant de finir, que la transaction conclue entre le commandeur, Joachim de Montaigut Fromigières, et les consuls de Garidech, pour régler l’exercice des droits de l’un et des prérogatives des autres. Non contents de cette précaution et se défiant de son effet pour la suite, les magistrats municipaux obtinrent du roi Louis XIII, un édit en date du mois d’avril 1639, qui les confirma dans leurs privilèges et leur reconnut le droit de juger par prévention les matières criminelles avec un assesseur et, en seuls, les affaires de simple police et les petites causes jusqu’à cent sols, ensemble les gages des valets ; édit qui fut confirmé par Louis XIV, en 1688 (7).
Dans les procès-verbaux de visite, nous trouvons que les commandeurs possédaient, outre la seigneurie foncière et spirituelle de Garidech et de son annexe Saint-Bibian divers fiefs à Gémil, Montastruc, Monpitol, etc., la collation de la chapellenie du Temple de Toulouse, ainsi que la jouissance des bâtiments qui en dépendaient, la seigneurie spirituelle et les dîmes de Cornebarrieu, qu’ils partageaient avec le Prieur de la Daurade et le chapitre de Saint-Etienne ; enfin les ténements de Labarthe, de Flamarens et d’Albe-feuille situés près de Montauban. Les revenus de cette commanderie s’élevaient, en 1750, à 6,480 livres et ses charges, à 712 livres.
6. Dom Vaissette, livre XXIX.
67 Archives Parlement de Toulouse.


Ces mêmes documents nous donnent la description du château des chevaliers à Garidech. Malgré son titre, cette vaste bâtisse, construite en briques ou même en torchis dans certaines de ses parties, n’avait plus dans les derniers temps, aucun des caractères d’une demeure féodale. Les années, qui l’avaient transformée, depuis que les Hospitaliers avaient cessé d’y résider, en simple bâtiment d’exploitation, n’avaient laissé subsister qu’une tour qui put la distinguer encore des maisons voisines. Aujourd’hui ses derniers vestiges ont disparu en même temps que les ruines du fort construit par les habitants dans son voisinage, à une portée de mousquet de l’église, disent les anciens actes. Il n’en reste plus que les fossés, convertis dans ces derniers temps en abreuvoir et une modeste masure, portant encore le nom de Fort, mais qui n’a de commun avec lui que son emplacement et peut-être les matériaux dont on s’est servi pour la construire.

§ 2. — Temple de Toulouse.
Le Temple de Toulouse existait-il lors de la fondation de celui de Laramet en 1134 ? Nous ne le pensons pas, car il eût été certainement cité dans la charte de donation de l’évêque Amélius. Mais son origine ne fut pas de beaucoup postérieure, ainsi que nous allons tâcher de l’établir.
Par suite de désastres dont nous aurons l’occasion de parler tout à l’heure, la grande partie des plus anciennes archives de cet établissement a disparu ; nous regrettons surtout la perte de la charte de fondation de la maison de Toulouse. Il ne nous en reste que la copie d’un fragment, faite postérieurement à l’occasion sans doute de quelque procès. Nous y voyons que les enfants de Toset de Toulouse (8), Raymond Ratier, Bertrand Estrouba et leurs sœurs, Brune et Sybille, assistées de leurs maris, Gérard Engelbert et Raymond Sarrasin, donnèrent à Dieu, au Temple de Jérusalem, à Hugues, Maître, aux chevaliers et aux pauvres de l’Ordre, le fief qu’ils possédaient entre l’Eglise de la Dalbade et les deux rues, dont l’une passe devant la porte de l’Eglise Saint-Remy (9). La copie s’arrête là, ne disant rien de la date de cette donation, mais la mention du grand-maître Hugues (de Payens), mort en 1136, nous donne une première indication à ce sujet. Ce fragment est suivi en outre d’une énumération fort intéressante de tous les bienfaiteurs du Temple de Toulouse à son origine. On y voit les chevaliers promettant de donner une rente annuelle en argent et après leur mort, leurs armes et leur meilleur cheval de bataille, tandis que leurs femmes s’engagent à donner aussi tous les ans, une chemise, une paire de braies et à leur mort leur meilleur manteau. Or, dans cette liste nous voyons figurer le prévôt de Saint-Etienne, Aycard, dont le Gallia Christiana fixe la mort au 12e jour des calendes d’octobre de l’année 1135. Si donc le Temple de Toulouse n’existait pas lors de la fondation de celui de Laramet, ces différentes remarques nous permettent d’établir que sa création eut lieu quelques mois après.

A peine fondé, le nouvel établissement vit ses possessions et son importance s’accroître rapidement ; en même temps aussi commencèrent à surgir les difficultés suscitées par cette prospérité même. Nous avons vu plus haut (10), comment les chevaliers de Saint-Jean et les Templiers n’entretinrent pas longtemps la bonne harmonie et comment de vives discussions au sujet des servitudes de leurs fiefs respectifs furent terminées en 1150 par une transaction entre le Prieur Bernard d’Azillan et le Maître Guillaume de Verdun.
8. Ce Toset de Toulouse est le même que celui qui avait donné aux Hospitaliers le fief et l’église Saint-Rémy, en 1115.
9. Pièces justificatives n° XXI.
10. Chapitre II.


L’histoire du Temple de Toulouse se réduit dans le principe à enregistrer les donations qui venaient incessamment accroître sa prospérité. Parmi celles dont les chartes nous sont parvenues nous nous bornerons à signaler les plus importantes.
Au mois de mars de l’année 1162, Guillaume et Yzarn d’Assalit (11), Vital de Posquières et autres seigneurs, donnèrent à l’Ordre du Temple les terres qu’ils possédaient à Fontenille, ainsi que les droits féodaux qu’ils y avaient sur chaque feu, — « à la condition de garder et de défendre la ville, ses habitans et leurs biens de tout malfaiteur. » Cette donation fut faite à Dieudonné de Girbert, maître du Temple de Toulouse, entre les mains de Raymond comte de Toulouse et de Jourdain de l’Isle qui la confirmèrent (12).
11. Sans doute de la même famille que Gilbert d’Assalit, grand membre de l’Ordre (1167-1169).
12. Pièces justificatives, n° XXII


Après la donation du fief de Tizac à la maison de Toulouse, dont nous aurons l’occasion de parler dans la suite (13), nous trouvons celle que fit Bernard de Saint-Romain au Maître, Piere de Toulouse, du palais de Peirelate, qu’il possédait à Saint-Cyprien et qu’on désigna depuis sous le nom de du Cavalerie, dans le mois de février 1168 (1169) (14). Enfin d’autres donations dont les archives ne contiennent plus les chartes, ajoutèrent aux biens du Temple de Toulouse les riches possessions de Lespinet, Bamville, etc.
13. V. Marestang.
14. Pièces justificatives, n° XCI.


L’ère tourmentée qui s’ouvre pour notre pays avec le XIIIe siècle n’arrêta pas le zèle des donateurs envers le Temple de Toulouse. On dirait même qu’il ne fit que l’accroître. On peut trouver une explication de ce fait dans le désir et le besoin qu’avaient la plupart des vassaux du comte de Toulouse, de donner des preuves d’une orthodoxie qui leur était, à tort ou à raison, fort contestée. Un des moyens les plus efficaces pour atteindre ce but était de se faire les bienfaiteurs des Ordres religieux, institués pour la défense de la religion. C’est celui que nous avons vu plusieurs fois employer par le comte Raymond VI (15), exemple suivi par beaucoup de ses vassaux, surtout ceux qui s’étaient signalés par leur attachement à sa cause.
Quoique les Templiers n’aient pris, ainsi que nous l’avons fait observer ailleurs, aucune part active aux luttes sanglantes, qui se déroulaient sous nos yeux, leur maison de Toulouse éprouva dans ce temps-là un désastre, qui fut sans doute l’un des innombrables épisodes de la guerre. Un acte de 1221 commence par cette note : « Comme dans l’incendie « qui dévora naguère la maison du Temple, les frères et « beaucoup de particuliers ont perdu leurs chartes (16) et (17). » Or, si nous consultons les historiens de cette époque désolée, nous voyons que, deux ans après la victoire de Muret, Simon de Montfort, rentrant d’une expédition malheureuse en Provence, et se défiant des sentiments d’affection et d’attachement qu’éprouvaient pour lui les habitants de sa bonne ville de Toulouse, résolut de les enchaîner par la crainte et, dans ce but, introduisit ses bataillons avec ordre de la traiter en ville conquise ; irrité à la vue de la résistance que rencontraient de toutes parts les bandes de ses guerriers, il donna l’ordre de mettre le feu à la ville et la canso dels Eretgés nous montre l’incendie éclatant, simultanément à Saint-Remézy, à Joutzaygues et à la place Saint-Etienne. Il est probable que ce fut alors que périt la maison du Temple de Toulouse.

La destruction des bâtiments fut si complète que les Maîtres de la province Toulousaine, transportèrent leur résidence à la Villedieu, et y demeurèrent habituellement jusqu’à la suppression de leur charge qui eut lieu, comme nous l’avons vu, vers le milieu du XIII siècle. Dans cet incendie, l’église seule fût, paraît-il, épargnée ; et c’est dans ce sanctuaire que Louis, fils de Philippe-Auguste, reçut de Guillaume, abbé de Castres, une partie de la mâchoire de Saint-Vincent, martyr, dont le corps était conservé dans cette dernière ville » (1215) (18).
15. Chapitre, I.
16. Pohtquom domus nüliciæ Templi de Tolosa fuit offlamata per ignem, quia ibi fratres et hahitatores, ejusdem domus et multi alii aniserunt eorum carta...
17. Archives de Toulouse, L. III. Bis
18. Dom Vaissette, livre XXII.


De nombreuses donations faites à la maison de Toulouse vers cette époque, augmentèrent ses dépendances du territoire de Larmont (1221-1228), du château de Patras situé à l’Isle-en-Jourdain (1231) et d’autres possessions, sur lesquelles nous aurons à revenir.
Les Templiers de Toulouse eurent maintes fois des discussions avec les chanoines de Saint-Etienne, au sujet du paiement des dîmes que les premiers devaient aux seconds. Ainsi, en 1222, nous trouvons une transaction conclue entre Guillaume de Lauret, prévôt de Saint-Etienne et Arnaud de Toulouse, maître du Temple dans la province Toulousaine. Ce dernier promit de payer la 15e partie des revenus de toutes les terres acquises antérieurement au concile de Latran (1215), et la dîme entière de toutes les autres, pour se conformer à un décret rendu en cette circonstance. Cet accord fut signé par Bernard, ancien évêque de Carcassonne (19), Bertrand de Cobirac, Prieur de l’Hôpital Saint-Jean de Toulouse, et Pierre Vital, chanoine de Saint-Sernin (20).
19. Bernard Raymond de Rochefort fut forcé par le Pape, lors de la croisade contre les Albigeois, de se démettre de son évêché ; ayant repris possession de son siège, lors de la soumission de sa ville épiscopale à ses anciens seigneurs, il on fut définitivement chassé par Louis VIII en 1336.
20. Archives de Toulouse, L. XXIII.


Malgré cet arrangement, cette discussion se renouvela dans la suite. Ainsi nous voyons en 1260, le prévôt du chapitre, Bertrand de l’Isle, et frère Guillaume de Saint-Jean, précepteur du Temple de Toulouse, obligés de remettre la fixation de leurs parts dans les dîmes de l’Espinet, à l’arbitrage d’un légiste, Maître Benoît Audiet, qui fixa au 12e des revenus la rente que devaient les chevaliers aux chanoines. Cette sentence fut approuvée par Raymond de Falgar, évêque de Toulouse et par Roscelin de Foz, maître du Temple en Provence (21).
21. Archives de Toulouse, L. VI.

Le désastre qui avait détruit la maison de Toulouse, vers 1215, avait été réparé pendant cette période, car nous trouvons un acte de la fin du XIIIe siècle, qui fut ratifié par Gigo d’Adhémar, Maître de Provence, et Je chapitre provincial réunis le 26 février 1297 (1298) dans le palais neuf du Temple de Toulouse (22).
22. Archives de Marestang

Les Templiers ne devaient pas jouir pendant longtemps de la demeure qu’ils venaient de relever de ses ruines. Dans la soirée du vendredi 13 octobre 1307, une troupe de soldats se présentaient devant les portes du Temple et en réclamaient l’ouverture au nom du roi. Quelques instants après les Templiers, arrachés de leurs retraites, ignorant encore la cause de leur disgrâce, étaient conduits enchaînés dans les rues de Toulouse et enfermés dans les prisons de la ville.
La plupart des Templiers de la ville de Toulouse furent emprisonnés dans la salle neuve du palais de la ville, et leurs noms ne figurent pas dans les interrogatoires publiés par Michelet. Ils étaient dans celte même prison en 1313, comme nous le prouve un document assez intéressant conservé dans les archives des Hospitaliers. C’est le compte des recettes et des dépenses faites, cette année-là, par frère Bernard de Gironde, trésorier de l’hôpital Saint-Jean de Toulouse. On y voit la mention des sommes payées pour l’entretien et la nourriture des Templiers détenus : il versait quotidiennement 18 deniers pour chacun des chevaliers et 9 deniers pour les frères servants : les premiers étaient G. de Gaillac et G. Micer et les seconds Hoton Saumate, le dernier précepteur du Temple de Toulouse, Hugues de Septfonds, Gérard de Peyrelaure, Déodat de Fraxines, Guillaume Bare et P. de la Barre. Les gages d’Athon de Rivalz, citoyen de Toulouse, député par le sénéchal pour l’affaire des Templiers, de Galtier de Serres châtelain de la Salle neuve et des gardes soumis à ses ordres, se montaient à 124 livres 14 sols et 2 deniers tournois (23).
23. Archives Toulouse. Documents généraux.

Leur éloignement de Paris, la protection des autorités locales, sauvèrent sans doute les Templiers de Toulouse du sort subi par tant de leurs confrères, quoiqu’une grande quantité de dépositions recueillies dans le procès, s’accordent pour signaler cette maison de l’Ordre comme le théâtre habituel des crimes les plus honteux.

Pour terminer l’histoire de la maison de Toulouse, il nous reste à voir ce que devinrent dans son désastre ses immenses possessions. Les archives du Grand-Prieuré, vont nous permettre de l’indiquer au moins en partie. Nous avons vu comment le roi, après beaucoup d’hésitation et de chicanes, donna, le 12 mars 1312, à frère Léonard de Thibertis, procureur du grand-maître, l’investiture des biens adjugés à l’Ordre de l’Hôpital dans toute l’étendue du royaume.

En vertu de ces lettres patentes, Dêodat de Rouaix bourgeois de Toulouse, délégué par Hugues de Gérard, juge d’appeaux, lieutenant de noble et magnifique, Jehan de Malhomet, seigneur de Blaynville et sénéchal de Toulouse et d’Albi, vint, le 27 décembre 1313, lever le séquestre royal de la maison du Temple, et en remettre la possession à frère Pierre de Caylus, lieutenant du Grand-Prieur de Saint-Gille. L’acte de prise de possession, contient un inventaire très intéressant de tous les meubles qui s’y trouvaient à cette époque; mais bien des mains plus ou moins spoliatrices avaient dû passer par là ; car ce mobilier ne nous donnerait qu’une faible idée de l’opulence si vantée des Templiers. Dans la chambre du trésorier il n’est fait mention que d’armoires pleines de chartes, de quelques armures et de l’étendard du Temple enfermé dans un coffre ; un objet désigné sous le nom d’Alexandre et qui n’était sans doute autre qu’un exemplaire du poème de ce nom, si renommé au XIIe siècle, et une viole viennent seuls rompre la monotonie de cette sévère nomenclature de boucliers, d’arbalètes, etc. Un acte séparé contient l’inventaire de l’église, qui avait conservé un plus grand nombre d’objets remarquables, entre autres un crucifix d’argent contenant une relique de la vraie croix et orné de 45 pierres précieuses (24). Le même délégué mit les Hospitaliers successivement en possession de toutes les dépendances de la maison du Temple de Toulouse, Laramet, Larmont, Marestang, l’Ile-en-Jourdain, Bamvilie, Autizac.....
24. Pièces justificatives n° XXIII.

La maison du Temple de Toulouse, après sa réunion à l’Ordre de Saint-Jean, fut adjointe tout naturellement à la chambre Prieurale de cette ville, et demeura pendant toute la durée du XIVe siècle sans destination fixe. La location de ces immenses locaux, ne produisait qu’un assez médiocre revenu au trésor des Grands-Prieurs. L’un de ces derniers, Raymond de Lescure, qui signala son administration par un grand nombre de réformes utiles, conçut la pensée d’affecter ce bâtiment qui était sans grande utilité pour l’Ordre, à une œuvre se rapprochant du but primitif de l’institution des Hospitaliers. L’ardeur de la foi, qui avait jadis transporté ces multitudes de pèlerins vers les saints lieux, quoique bien diminuée depuis deux siècles, n’était pas encore complètement éteinte. Mais pour les hommes de la fin du XIVe siècle, les difficultés que savait surmonter l’enthousiasme de leurs pères pour venir s’agenouiller auprès du tombeau du Sauveur, étaient devenus des obstacles inabordables : le voyage était fort long, la mer, très fertile en naufrages et le cimeterre des Sarrasins, bien menaçant. Aussi trouvèrent-ils plusieurs moyens plus faciles pour satisfaire à la fois leur piété et leur amour des pérégrinations lointaines. Ce fut alors qu’on vit ces longues files de pèlerins se diriger le bourdon à la main, vers le tombeau des saints apôtres, à Rome, ou vers le sanctuaire vénéré de Saint-Jacques de Compostelle en Espagne. Ce dernier surtout était en grand honneur dans nos contrées, et la ville de Toulouse était encombrée de pèlerins que leur piété entraînait au-delà des Pyrénées. Leur nombre était si considérable et leur dénuement ordinairement si complet, que l’on avait déjà créé pour eux l’hôpital Saint-Jacques, situé près de Saint-Sernin, et qui ne tarda pas à devenir insuffisant. Ce fut alors que Raymond de Lescure conçut le projet de transformer la maison du Temple en une succursale de cet établissement. Le Grand-Maître, Philibert de Naillac, lui en accorda l’autorisation par une bulle du 24 novembre 1408 ; il affecta à cette œuvre, comme nous l’avons vu plus haut, les revenus de la commanderie de Garidech ; le Grand-Prieur de Toulouse et son chapitre provincial, étaient chargés de la haute surveillance de l’hôpital et devaient nommer chaque année des commissaires pour cette inspection (25).
Nous trouvons dans les archives, plusieurs procès-verbaux de ces inspections annuelles. Nous nous contenterons de citer celles que firent en 1519 les chevaliers Jean Salomon, commandeur de Montsaunès, et Jacques de Manas, commandeur d’Argenteins. Nous les voyons s’informer minutieusement auprès des malades, « s’ils estoient bien traictez de lictz, linceulx, couvertes, serviettes et autres choses à eux nécessaires. » Après une visite consciencieuse, ils ordonnent diverses améliorations, ils prescrivent que tous les ans, on fera une provision de bois et de charbon pour la somme de 6 escuz, et qu’on remettra « 15 sols èz mains de l’hospitalière pour qu’elle en achète des grazals, trancheurs, platz et escuelles pour le service des pouvres. » Quand un de ces derniers sera en danger de mort, la lampe de l’hôpital sera allumée toute la nuit (26).
25. Pièces justificatives, n° XXIV.
26. Archives du Temple de Garidech, L. I.


Citons encore pour avoir une idée de ce qu’était dans toute sa simplicité, un établissement de bienfaisance au XVIe siècle, l’inventaire que fit faire en 1518 le commandeur de Garidech, Melchior d’Aspremont, de tout ce que comprenait l’hôpital du Temple, en présence du chapelain et de l’hospitalière de la maison. Le bâtiment se composait d’un seul corps de logis, où il ne se trouvait qu’une vaste salle « avec une grande « cheminée, quatre fenêtres bien closes, une grande table, « neuf litz avec leurs garnitures et une lampe à huile pour esclairer la nuict. » Auprès de ce corps principal, s’élevaient des dépendances destinées au logement de l’hospitalière et aux décharges ; derrière, était le cimetière pour la sépulture des pauvres morts à l’hôpital. L’inventaire décrit ensuite l’église et son clocher avec deux cloches, dans l’intérieur, son presbytère séparé de la nef par une balustrade en bois, ses trois autels dédiés, le premier, à Notre-Dame, le second, à Sainte-Barbe, le troisième, à Sainte-Catherine. Puis vient la description détaillée du mobilier et des objets sacrés, parmi lesquels nous cherchons vainement les riches ornements et les précieuses reliques qui composaient le trésor de cette église lors de l’inventaire de 1313 (27).
27. Archives Temple de Garidech L I.

Les Capitouls, parmi leurs nombreuses attributions, avaient la surveillance des hôpitaux. Des différends ayant surgi entre eux et les chevaliers de Saint-Jean, ils conçurent le projet de leur enlever la direction et la propriété de l’hôpital du Temple pour les donner aux Sœurs de Sainte-Claire de Saint-Cyprien. Ils soulevèrent mille chicanes et en vinrent jusqu’à contester les titres de possession des chevaliers. Le Parlement, saisi de cette affaire, rendit un arrêt par lequel le commandeur du Temple, était tenu de présenter dans un très bref délai la bulle de fondation de l’Hôpital ; faute de quoi, il se verrait contraint de céder la maison du Temple aux prétentions de ses compétiteurs. Or, cette bulle n’avait été conservée qu’à Rhodes et cette ville étant alors assiégée par les Turcs, il devenait à peu près impossible de se conformer à l’arrêt de la cour. Dans cet embarras les chevaliers de Saint-Jean adressèrent leurs doléances au roi François Ier, protecteur déclaré de leur Ordre. Ce dernier leur fît délivrer immédiatement des lettres patentes, dans lesquelles, après avoir exprimé son indignation de voir les Capitouls « vouloir et « s’esforcer translater ung tas de religieuses assizes et habitantes en ung bon couvent à Tholoze en la maison et hospitalité du Temple, » et considérant l’impossibilité où se trouvaient les chevaliers de produire leurs titres de possessions; « à cause de leur probable absence et continuelle occupation qu’ils ont à la ville de Rhodes pour la tuhition et défense de nostre foy catholique, contre les Turcs infidélles, qui notoirement se sont mis sus pour guerroyer et opprimer lesdits religieux, » il accorda au commandeur de Garidech un an de sursis et jusqu’à cette époque, cassa, annula et révoqua tout ce qui avait été fait contre eux (1519) (29). Grâce à la production de leurs titres qu’ils purent faire lorsque les communications avec Rhodes furent rétablies, la décision de la cour confirma leurs droits incontestables, les Capitouls renoncèrent à leurs desseins et les religieuses de Sainte-Glaire durent se résigner à habiter leur couvent de Saint-Cyprien qu’elles firent agrandir dans la suite.
29. Archives du Temple de Garidech, L. I.

Quelques années plus tard, ainsi que nous l’avons dit ailleurs, un arrêt rendu le 25 février 1524 par le Parlement, vint réunir au Grand-Hôpital Saint-Jacques, la plupart de ces établissements de bienfaisance, que la charité de nos pères avait répandus avec une si admirable profusion dans les différents quartiers de la ville, mais dont la multiplicité même créait un danger en temps d’épidémie, pour l’état sanitaire du voisinage. Dans cette mesure, fut compris l’hôpital du Temple ; cet établissement rentra dans le domaine particulier des commandeurs de Garidech, qui furent obligés de verser dans le trésor de l’Hôtel-Dieu, les sommes qu’ils employaient précédemment à l’entretien et au soulagement des pauvres recueillis sous leur toit. Cette dernière obligation ne tarda pas à paraître très onéreuse aux commandeurs qui s’ingénièrent à trouver le moyen de s’y soustraire ; d’autant plus que souvent leurs revenus étaient amoindris et leurs charges s’augmentaient d’une façon imprévue. C’est ainsi qu’en 1528, la famine, qui désola le pays et fit affluer à Toulouse un nombre considérable d’indigents, décida le Parlement à taxer tous les corps religieux, pour contribuer « à l’entretaînement et au nourrissement des pouvres, estant en grand et excessif nombre en la cité, à cause de la stérilité des fruits et famine de cette année. » La part du commandeur du Temple dans cette taxe fut fixée à 15 francs par mois, « en outre de ses aumônes ordinaires (30). »
30. Catel. Mémoires.

En présence de la négligence des commandeurs de Garidech à s’acquitter de leurs obligations envers l’hôpital Saint-Jacques, le syndic de cet établissement porta ses plaintes devant le Parlement. La cour de Toulouse demanda la production de la bulle de fondation de l’hôpital du Temple, et ordonna la saisie des revenus de la commanderie. Pour détourner le coup qui le menaçait, le commandeur, André de Guiramand, obtint du roi, des lettres patentes datées de Fontainebleau, 8 janvier 1549, par lesquelles, mécontent de voir que son Parlement tâchait de diminuer les ressources de ces bons zélateurs et défenseurs de la foy, il évoquait devant son grand conseil, toutes les affaires relatives aux hôpitaux et notamment celles du Temple de Toulouse (31).
31. Archives du Temple de Garidech, L I.

Pour assurer plus complètement le succès de cette affaire, le Grand-Maître, Jean de Homédès, ordonna par une bulle du 20 mai 1549, la suppression officielle de l’hôpital du Temple, suppression qui existait de fait depuis 1524. Dans ce document, considérant que l’ardeur des pèlerinages s’était bien refroidie depuis l’époque de cette fondation, que les charges qui pesaient sur Malte devenaient de jour en jour plus lourdes, notamment dans ce moment où la nécessité de fortifier l’île contre les ennemis de la croix se faisait impérieusement sentir, le Grand-Maître révoque la bulle de son prédécesseur Philibert de Nailhac ; il décide que Garidech reprendra son état primitif de commanderie ordinaire. Une bulle du Pape vint bientôt après approuver et confirmer celle du grand-maître (32).
32. Archives du Temple de Garidech, L I.

D’après les instructions que lui envoya le nouveau grand-maître Jean de la Valette, le commandeur de Garidech, Antoine de Thézan-Venasque, proposa au syndic de l’hôpital Saint-Jacques la voie de la conciliation. Ils remirent leurs discussions à l’arbitrage de « vénérables et égrèges personnes, Monseigneur Jean Daffis, quart président en la cour suprême du Parlement de Thoulouze, Guérin d’Alzon, François d’Auriac, conseillers en icelle, Bertrand d’Aigua, avocat général en la dicte court, nobles Jean del Puech, Nicolas d’Hispania, Rogier du Prat, Bertrand Séré, Capitoulz. » Ces arbitres décidèrent que le commandeur de Garidech serait tenu de payer annuellement la somme de 300 livres ; moyennant quoi l’Hôtel-Dieu devait « entretenir « toute l’hospitalité, à laquelle était obligée la maison du Temple, sans avoir rien à réclamer en plust (33). »
33. Archives du Temple de Garidech, L. I.

La maison du Temple de Toulouse était devenue, depuis la suppression de l’hôpital, la résidence habituelle des commandeurs de Garidech, quand ils venaient dans la contrée. Depuis que les chevaliers de Saint-Jean faisaient des séjours moins longs et moins fréquents dans l’île de Malte, où leur présence était devenue moins nécessaire, ils ne tardèrent pas à se trouver fort mal logés, dans ces vieux bâtiments où aucune des exigences de la vie d’alors ne se trouvait satisfaite. Le commandeur, François de Beausset, entreprit la restauration et l’embellissement de la maison du Temple et y contribua généreusement de ses propres deniers. « Ayant remarqué, est-il dit dans le procès-verbal de la visite de 1694, qu’une vieille grange presqu’en ruines occupait le plus bel endroit de l’enclos du Temple, attendu qu’il a sa vue sur la rivière de Garonne et sur le pais de Gascogne jusqu’aux Pyrénées, » il y lit construire avec l’autorisation du chapitre provincial un grand bâtiment à 4 étages ; il lit de plus « enduire la muraille qui fait façade à la rue et la fit couronner par de beaux créneaux de briques, ce qui fait un joly effet pour la maison. » Toutes ces bâtisses avaient coûté au chevalier de Beausset la somme de 6768 livres 16 sols 11 deniers (34).
34. Archives du Temple de Garidech, L. X.

De nos jours, on rechercherait vainement les derniers vestiges du Temple de Toulouse, et ce n’est qu’en consultant les indications des anciens cadastres do la ville, qu’on peut fixer son emplacement sur une portion des terrains occupés maintenant par le couvent des religieuses de la Visitation.

§ 3. — Cornebarrieu (H).
Département: Haute-Garonne, Arrondissement: Toulouse, Canton: Pribrac - 31

Domus Hospitalis Cornebarrieu
Domus Hospitalis Cornebarrieu

Dans la partie nord du territoire de Pibrac s’étendait l’alleu de Cornebarrieu (allodium de Cornebarrillio), au centre duquel s’élevait une église et un village que les anciens actes nous désignent sous le nom de Saint-Clément de Cassarac et qui prirent dans la suite la dénomination du fief où ils se trouvaient situés. Au mois de décembre de l’année 1128, Pierre de Pibrac donna à l’hôpital, à frère Raymond de Laignac, hospitalier, sa portion du dîmaire de l’église de Saint-Clément de Cassarac, en s’en réservant la seigneurie ; ceci se passait en présence d’Hugues de Pomarède, d’Esquat d’lscio et de ses fils Raymond et Roger (1), Un des descendants de ce môme seigneur, Pierre Raymond de Pibrac, compléta cette donation par la cession des droits qu’il possédait sur ce territoire (1180) (2). Par suite, les Hospitaliers furent seigneurs spirituels du village de Cornebarrieu, dont ils partageaient les dîmes avec le chapitre de Saint-Etienne et le Prieur des Bénédictins de la Daurade. Malgré le peu d’importance de ce qu’ils y possédaient, Cornebarrieu fut érigé par eux en commanderie. Dans la première moitié du XVe siècle, cette commanderie cessa d’exister et fut réunie à celle de Garidech, ainsi que nous l’avons vu plus haut.
1. Pièces justificatives, n° XVI.
2. Archives de Pibrac, L. I.


§ 4. — La Barthe, Flamarens, Albefeuille (T).
Département: Tarn-et-Garonne, Arrondissement: Castelsarrasin, Canton: La Villedieu-du-Temple - 82

Domus Hospitalis Albefeuille
Domus Hospitalis Albefeuille

Situés entre la Garonne et la Villedieu, les fiefs de la Barthe et de Flamarens, ainsi que la paroisse d’Albefeuille, faisaient partie de cette commanderie. Ce ne fut que vers le milieu du XVIIe siècle qu’ils en furent détachés pour former un membre de celle de Garidech. Leurs archives, fort peu considérables du reste, ne nous ont conservé qu’une sentence du sénéchal ordonnant que le commandeur de la Villedieu et le chapitre Saint-Etienne de Montauban contribueraient à la reconstruction de l’église d’Albefeuille, proportionnellement aux dîmes qu’ils y percevaient (1525) et des discussions entre les commandeurs et les tenanciers de la Barthc, pour la fixation des droits seigneuriaux (1581 et 1643).

1° Liste des Commandeurs de Garidech.
1260. Raymond de Pailhès.
1264-1275. Bernard de Caminières.
1275-1276. Raymond d’Aure.
1294. Pierre de Falmète.
1320. Fortanier de Gordon.
1324. Arnaud de Jori.
1347-1367. Raymond de Saint-Just.
1374-1398. Pierre de Salinier, receveur du Grand-Prieuré.
1432. Jean de Margatte.
1434. Pierre de Pagèze.
1446-1469. Jean du Puy.
1475. Etienne Labola.
1475-1491. Pons de Raffin.
1495-1497. Guillaume Seytre chevalier.
1515-1536. Marquiot ou Melchior d’Aspremont.
1536-1554. André de Guiramand.
1554-1560. Antoine de Thésan Vénasque.
1622. Jules de Montmorency.
1630. Joachim de Montaigut Fromigières.
1648-1650. Antoine de Blacas-Vérignon.
1660-1665. Thomas de Villages.
1680-1685. Charles de Martin-Puylobrier.
1685-1687. Paul-Antoine de Quiqueran Beaujeu.
1689-1694. François de Bausset.
1712. Antoine de Puget Clapier.
1721. Joseph de Castellane Mazaugues.
1730. Claude de Simiane.
1740. Joseph-Balthazar de Gras-Presville.
1751. Alphonse de Pontlevès Maubourguet.
1785-1789. N. de Lafare.

Liste des Commandeurs du Temple de Toulouse.
1170. Jean de Nogayrol.
1191-1201. Arnaud de Millars.
1205-1208. Gérard.
1211. Boson.
1212-1213. Grégoire.
1214. Raymond de Carcassonne.
1221-1240. Grégoire (2e fois).
1240-1241. Raymond de Belcaire.
1241-1245. Jean de Roquefort.
1246-1247. Raymond de Récalde.
1248-1250. Grégoire (2efois).
1230-1251. Jourdain.
1252-1260. Bernard du Four.
1260-1263. Guillaume de Saint-Jean.
1263-1264. Raymond de Mongaillard.
1264-1268. Guillaume de Saint-Jean. (2e fois)
1269-1271. Hugues Radulphe.
1272-1274. Pierre de Béziers.
1275-1276 Raymond Rotbert.
1276-1277. Arnaud de Calmont.
1277-1278. Arnaud d’Aspet.
1278-1280. Raymond Rotbert (2e fois)
1280-1281. Foulques Béranger.
1282-1284. Pierre de Gavarret.
1284-1285. Arnaud d’Aspet (2e fois).
1285-1289. Bernard de Lavandière.
1290-1291. Foulques Bérenger (2e foie).
1292-1294. Bernard de Leymont.
1295-1307. Hoton Saumate.

Liste des Précepteurs de Cornebarrieu.
1128, Raymond de Lainiac.
1180. Gavaldan.
1187. Raymond Donat.
1241. Arnaud de Gardoc.
1262. Pierre de Florence.
1263-1296. Guillaume de Montséron.
1323-1324. Bernard de Gironde.
1355. Pons de Raflaud trésorier du Prieuré.
1421. Bernard des Pierres (de Saxis).

4° Précepteurs du membre de Saint-Bibian.
1491-1515. Pierre de Bourdaleze.
Du Bourg, Antoine. Histoire du grand prieuré de Toulouse et des diverses possessions de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem dans le sud-ouest de la France, avec les pièces justificatives et les catalogues des commandeurs. 1883 Toulouse. BNF

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