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Généalogies des Grands-Maitres Hospitaliers, Rhodes, Malte
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Bertrand de Comps. 20 septembre 1236 — avril 1239

Pierre de Vieille Bride. 1240 — 18 novembre 1241
L'origine de Bertrand de Comps, successeur de Guérin, était, selon les généalogistes, dauphinoise. Tous le rattachent à la ville de Comps en Bas-Dauphiné, et à la famille de Vesc, dont une branche, vers 1280, par Dalmas de Vesc, se substitua aux anciens seigneurs de Comps (1). Cette filiation, pour n'être pas appuyée sur des documents positifs, ne semble pas dénuée de vraisemblance (2). Ce qui est certain, c'est que le nom porté par le grand-maître appartient au midi de la France (3). Les fonctions de prieur de S. Gilles, qu'il exerça avant son élévation au magistère, et qui étaient généralement confiées, comme nous en avons fait plus haut la remarque, à des chevaliers originaires du ressort même du prieuré, ne sont pas un obstacle à cette hypothèse, puisque le Bas-Dauphiné relevait à cette époque du prieuré de S. Gilles.

La première mention connue de l'existence de Bertrand de Comps est de février 121G. Il était alors simple frère, et résidait en Terre Sainte (4). Quinze ans plus tard, il apparaît en qualité de prieur de S. Gilles dans des actes qui s'étendent du 8 décembre 1231 au 17 avril 1234 (5). Si nous ignorons l'époque exacte à laquelle il devint prieur, celle-ci ne doit pas être fort éloignée de l'année 1231, puisqu'en 1229 le titulaire du prieuré était encore G. des Ormes (6).

Il fut élu grand-maître dans le courant de l'été de l'année 1236 (entre le mois de mai et le 20 septembre (7). Bien qu'entre avril 1234 et l'été de 1236 nous n'ayons aucun document qui le concerne, rien n'empêche de penser qu'il fut directement appelé du prieuré de S. Gilles à la grande maîtrise. Il occupa ces hautes fonctions au moins jusqu'en avril 1239 (8), peut-être même quelques mois de plus, la première mention de son successeur Pierre de Vieille Bride datant de 1240 (9).

Sous l'administration de Bertrand de Comps, la paix, assurée avec les Infidèles jusqu'en 1237, continua à donner aux Hospitaliers le répit temporaire dont ils jouissaient déjà sous le magistère de Guérin et à les délivrer de la crainte du péril musulman (10). L'Ordre cependant paraît, à deux reprises différentes, avoir songé à unir ses intérêts à ceux des ennemis de la foi, infidèles ou schismatiques. Jusqu'à quel point ces projets eurent-ils un commencement d'exécution, nous ne saurions le dire. Toujours est-il que le pape accusait les Hospitaliers de vouloir s'allier à la secte des Assassins contre le prince d'Antioche, avec lequel ils étaient en hostilités déclarées (11), et leur reprochait de percevoir de celle-ci un tribut annuel en échange de la protection qu'ils lui accordaient. Le fait de la perception du tribut, que nous connaissons par ailleurs, est hors de doute ; mais l'alliance incriminée fut-elle réalisée ou seulement projetée ? C'est ce qu'il est impossible de déterminer. Grégoire IX englobait dans l'accusation et dans la menace d'excommunication, qu'il formula le 20 avril 1236, les Templiers aussi bien que l'Hôpital (12). Deux ans plus tard (13 mars 1238), dans une bulle d'une extrême sévérité (13), il s'élevait contre la vie scandaleuse et la discipline relâchée des Hospitaliers, leur enjoignait de les réformer sous trois mois, et les accusait cette fois de soutenir Jean Ducas, dit Vatace, gendre de Théodore Lascaris, qui s'était fait proclamer empereur d'Orient à Nicée et menaçait la domination chancelante des empereurs latins de Constantinople. Les craintes du pontife étaient-elles exagérées ou réelles ? Pour l'honneur de l'Ordre il serait à souhaiter que des faits positifs permissent d'infirmer la vérité de ces allégations, mais le silence des chroniqueurs autorise toutes les suppositions. Il n'est pas permis de penser que des insinuations d'un caractère aussi grave aient pu se faire jour sans quelque fondement, et il paraît hors de doute que le relâchement de la discipline, blâmé par le S. Siège, se produisit effectivement à ce moment, et que ces alliances coupables, si elles ne furent pas réalisées, furent au moins préméditées par l'Hôpital.

Le magistère de Bertrand de Comps n'offre, pour le développement de l'Ordre, aucun fait exceptionnellement important. En Terre Sainte, il suffit de signaler quelques donations et confirmations (14): la cession par les Hospitaliers du casal de la Noye aux Teutoniques (15), le règlement d'un différend entre l'Hôpital et l'église de Bethléem (16), et un nouvel arbitrage dans le litige déjà partiellement réglé avec l'évêque d'Acre (17), et sur lequel s'étaient greffées des revendications accessoires(18). En Chypre, les libéralités d'Agnès de la Beaume et du roi Henri de Lusignan procurent au grand-maître de sérieux accroissements territoriaux (19). En Occident enfin, les progrès se manifestent surtout dans les pays de l'Allemagne orientale (Poméranie, Silésie, Moravie et Pologne), qui s'ouvrent de plus en plus à l'influence des Hospitaliers (20). Cette expansion, que nous avons déjà signalée depuis les premières années du XIIIe siècle, et dont nous aurons également occasion d'indiquer le développement ultérieur, est d'autant plus remarquable qu'elle se produisit malgré la création des Teutoniques, dont le caractère et les sympathies essentiellement allemandes auraient dû accaparer toutes les faveurs et toutes les libéralités des princes et des fidèles de l'Europe centrale. Le fait est inexplicable, et on ne peut que se borner à le constater.

C'est aussi à cette époque que se rattache la codification des Usages (usances) et du Code Pénal (esgarts) de l'Ordre, dont nous aurons occasion de parler plus loin.

Il semblerait que la mémoire de Bertrand de Comps ait dû être ternie par les accusations dont il fut l'objet de la part du souverain pontife. Les historiographes de l'Ordre n'ont cependant laissé percer, dans le jugement qu'ils ont porté sur le grand-maître, aucune allusion à ces faits regrettables; quel qu'ait pu être leur désir d'apprécier favorablement le gouvernement de Bertrand de Comps, on peut s'étonner que leurs appréciations n'aient été en aucune façon influencées par la conduite, au moins imprudente, qu'il tint en ces circonstances. Ce fut, disent-ils, un homme intègre et prudent, qui sut profiter du trésor que son prédécesseur avait constitué pour augmenter la puissance de l'Hôpital. Il soumit, ajoutent-ils, à son autorité un grand nombre de terres occupées par les Sarrasins, et, plus que tout autre grand-maître, donna aux frères chevaliers le pas sur les autres frères de l'Ordre (21).

Rien de ce que nous savons de Bertrand de Comps ne permet de dire que ce jugement soit conforme à la vérité. Le développement du pouvoir des chevaliers au détriment des autres classes de frères peut être vraisemblable, mais n'est attesté par aucun texte positif. Il en est de même des accroissements territoriaux obtenus sur les Infidèles ; nous ne voyons rien de semblable dans les chroniques et les documents d'archives. Quant aux qualités personnelles prêtées au grand-maître, ellesne ressortent ni de témoignages particuliers, ni de l'ensemble des événements que nous avons examinés. Il semble donc que les éloges prodigués à Bertrand de Comps soient sujets à caution; l'impression générale qui résulte de l'étude de ce magistère est loin d'être aussi favorable que le tableau qui nous est tracé par les annalistes de l'Ordre. Que le développement de l'Hôpital ait profité, dans une large mesure, sous Bertrand de Comps, de circonstances spécialement heureuses, la chose est possible, et nous ne sommes pas en mesure de la contester ; mais que l'Ordre n'ait pas subi, du fait des compromissions du grand-maître et du relâchement de la discipline, un certain discrédit et un affaiblissement moral, c'est ce qu'il paraît également difficile d'accepter sans réserve.

Pierre de Vieille Bride, successeur de Bertrand de Comps, fut nommé grand-maître à la fin de Tannée 1239 ou en 1240 (22). C'était, au moment de son élévation au magistère, un des grands-officiers de l'Ordre. La première mention connue de son existence, en qualité de simple frère, est de février 1216 (23); nous le trouvons ensuite investi du grand-préceptorat, du 18 juillet 1237 (24) au mois d'avril 1239 (25), charge qu'il échangea contre la grande maîtrise à la mort de Bertrand de Comps. Il semble avoir constamment résidé en Terre Sainte, aussi bien en 1216 que de 1237 à 1239. Ce séjour au siège de l'Ordre et les fonctions de grand-précepteur qu'il occupait le désignèrent, par l'expérience qu'il devait avoir acquise des affaires de l'Hôpital, au choix des électeurs.

La forme étrange sous laquelle son nom nous est parvenu est une déformation de celui de Vieille Brioude (de Vieille Briude, de Vieille Bride, de Veteri Privata, de Veteri Briva (26), et ne laisse aucun doute sur son origine auvergnate; celle-cin'avait pas été jusqu'ici signalée, et les généalogistes de l'Ordre, probablement effrayés de l'aspect anormal de cette désignation, n'avaient jamais songé à rattacher Pierre de Vieille Bride à l'Auvergne.

Au moment de l'avènement de Vieille Bride au magistère, Thibaut IV de Champagne, roi de Navarre, qui s'était croisé avec mille à quinze cents chevaliers français, était en Terre Sainte (27). Forcé par ses compagnons, contre son propre sentiment et celui des grands-maîtres des trois ordres militaires, à marcher sur Gaza, il s'était fait infliger (13 novembre 1239) par le sultan de Damas Malek es Saleh Ismaïl une sanglante défaite (28) ; les chefs des Templiers et des " Hospitaliers avaient eu grand peine, le lendemain, à dissuader le roi de Navarre de chercher à dégager ses prisonniers et de transformer, par une nouvelle et téméraire attaque, sa déroute en désastre (29). Battu, il s'était replié sur Jaffa et Ascalon ; mais bientôt il avait prêté l'oreille aux propositions d'alliance de Malek es Saleh Ayoub, sultan d'Egypte, qui, de concert avec l'émir d'Emesse, songeait à reconquérir Damas (été de 1240), et offrait aux Chrétiens, pour prix de leur coopération, la restitution de Safed et de Beaufort, du pays entre Sidon et Tibériade, et des territoires en deçà du Jourdain que les Musulmans leur avaient enlevés. Sur les instances des Templiers et contrairement à l'avis formel des Hospitaliers, Thibaut avait accepté, et pris possession des places qui lui avaient été promises (30) ; il avait alors joint une partie de ses forces, — Pierre de Vieille Bride et ses chevaliers s'étant retirés avec un nombre assez considérable de pèlerins (31), — à celles des Sarrasins ; mais l'alliance avait été aussi mal vue des Infidèles que des Chrétiens, et les confédérés avaient été battus par le sultan de Damas. A la suite de cet échec, le comte de Champagne s'était replié sur Ascalon pour fortifier la place, et les Templiers avaient mis Safed, qui venait de leur être rendu, en état de défense. Après quelques projets d'intervention en Egypte, qui n'aboutirent pas malgré l'appui que leur donnaient le Temple et l'Hôpital, toujours partisans d'une action dans ce pays (32), Thibaut découragé quitta sans bruit la Terre Sainte à la fin de septembre 1240, pour regagner l'Occident (33).

Au lendemain du départ de Thibaut, Richard de Cornouaille débarquait à Acre (11 octobre 1240), accompagné de nombreux croisés anglais, parmi lesquels le prieur d'Angleterre Thierry de Nussa (34). Logé dans le palais des Hospitaliers, Richard fut aussitôt circonvenu par eux et sollicité d'entrer dans leurs intérêts, puis successivement par les Templiers et les Teutoniques dans un but analogue ; il ne tarda pas à se convaincre que les chrétiens de Terre Sainte, par leurs querelles et leurs compétitions, étaient les propres artisans des malheurs dont ils se plaignaient dans les lettres éplorées qu'ils ne cessaient d'adresser en Occident. Dès son arrivée, Richard s'appliqua à compléter les défenses d'Ascalon, qu'il termina en mars 1241. Pendant ce temps, le traité préparé par Thibaut de Champagne avec le sultan d'Egypte, — qui assurait aux Chrétiens la région montagneuse de Beirout, le territoire de Sidon, Beaufort, Tibnin, Tibériade avec le district qui s'étendait à l'est de cette ville, les localités qui environnaient Jérusalem du côté de Jaffa et du Jourdain, et la promesse de la délivrance de tous les prisonniers, Chrétiens ou Musulmans, — fut présenté à l'approbation de Richard. Celui-ci, sur les conseils du duc Hugues IV de Bourgogne, du comte Gautier de Jaffa et du grand-maître de l'Hôpital (35), s'empressa de donner sa ratification à l'envoyé du sultan. Les instruments de paix furent échangés le 23 avril 1241, et les prisonniers relâchés; le 3 mai suivant, Richard s'embarqua à Acre pour rentrer en Angleterre (36).

L'intervention de Richard, malgré la délégation officieuse qu'il tenait de l'empereur Frédéric II, son beau-frère, n'avait pas réussi à rétablir le calme en Syrie. Le parti des Impériaux s'affaiblissait de plus en plus; les deux frères jumeaux, — c'est ainsi que Richard désignait le Temple et l'Hôpital, — chargés plus particulièrement de défendre la Terre du Seigneur, s'enorgueillissaient de leurs richesses au lieu de les employer au salut de la cause chrétienne, et, oublieux des ordres du souverain pontife, souillaient la discorde autour d'eux et étaient toujours prêts à entrer en lutte l'un contre l'autre (37). Ce conflit éclata dès que le comte de Cornouaille eut quitté la Palestine; les Templiers, refusant d'accepter la trêve dont Richard avait été le médiateur, molestèrent de toutes façons les Hospitaliers, qui y avaient adhéré, et allèrent jusqu'à les assiéger dans leur couvent d'Acre, à leur couper les vivres et à les empêcher d'enterrer leurs morts hors de leur maison. Ils agirent de même contre les Teutoniques ; leurs sentiments de haine étaient tellement notoires que Richard, prévoyant ce qui devait arriver et sachant que l'animosité des Templiers était capable de s'exercer même au détriment des intérêts vitaux de la cause chrétienne, s'était abstenu de leur remettre la garde du château d'Ascalon, nouvellement fortifié, dont ils se flattaient d'être investis, et l'avait confiée au représentant de l'empereur (38). En même temps, le maréchal impérial Filangieri, isolé à Tyr, était rentré secrètement à Acre, grâce aux intelligences qu'il avait nouées avec les Hospitaliers et deux des principaux bourgeois de la ville, et préparait les conditions du rétablissement de son autorité. Philippe de Montfort, cousin des Ibelin, qui venait d'arriver d'Occident en qualité de croisé et avait retrouvé dans les premiers barons de Terre Sainte des amis et des parents, était à Acre le représentant du parti chypriote. Prévenu du danger, il appela à son secours Balian d'Ibelin, seigneur de Beirout. Celui-ci, avec l'aide de Montfort, investit le couvent de l'Hôpital, dans lequel on croyait que le maréchal s'était réfugié, et maintint le blocus pendant six mois. Quand Vieille Bride et ses chevaliers, qui guerroyaient aux environs de Margat contre le sultan d'Alep, revinrent à Acre, ils durent camper en dehors des murs, et il ne leur fut permis de rentrer dans la ville que sur la déclaration formelle du grand-maître qu'il n'avait jamais favorisé les menées du maréchal. Vieille Bride fit observer que, si ses chevaliers, préposés à la garde du couvent en son absence, avaient noué des intelligences avec Filangieri, leur trahison n'excusait pas l'outrage fait à l'Ordre par Balian d'Ibelin qui, pendant de longs mois, avait traité le palais du grand-maître en château ennemi. Ibelin, pour expliquer sa conduite, dut avouer qu'il n'avait agi de la sorte que dans l'espoir de s'emparer du maréchal, et qu'il n'avait eu contre les Hospitaliers aucune animosité particulière (39). A la tentative de Filangieri contre S. Jean d'Acre les barons de Syrie répondirent en chassant de Tyr les Impériaux (juin 1242), et en mettant en fait, par la prise de cette place, la seule que les partisans de Frédéric II occupassent encore, fin à la domination de l'empire en Terre Sainte. « Enfin, disent les chroniques de Chypre, cette venimeuse plante des Lombards fut déracinée à jamais des pays d'outremer (40) ». Les vrais amis de la cause chrétienne ne pouvaient assez se féliciter de ce résultat; il leur donnait l'espoir que, débarrassée des agissements du parti allemand, la Terre Sainte allait se relever et mettre fin à l'anarchie, que les rivalités et les compétitions intestines avaient suscitées et dont les tristes événements que nous venons de retracer marquaient la profondeur.

Nous ignorons l'époque exacte de la mort de Pierre de Vieille Bride. Elle ne fut pas, en tout cas, postérieure au printemps de l'année 1243, puisque, le 31 mai 1243, le magistère était déjà occupé par Guillaume de Châteauneuf (41). Cette constatation va à l'encontre de l'opinion généralement admise, qui fait mourir Vieille Bride à la bataille de Gaza (17 octobre 1244), et s'appuie sur une lettre, reproduite par la Chronique de Matthieu de Paris, dans laquelle le grand-maître Guillaume de Châteauneuf, racontant les événements dont la Terre Sainte fut le théâtre, et notamment la bataille de Gaza, dit que les grands-maîtres du Temple et de l'Hôpital périrent (ceciderunt) dans cette rencontre (42). Comme cette lettre émane de Châteauneuf, il était naturel de conclure que celui-ci y mentionnait la mort de son prédécesseur. Mais tout le raisonnement repose sur une erreur d'interprétation du mot : ceciderunt. En lisant le passage avec attention, on constate qu'il ne s'agit pas de la mort des grands-maîtres, mais seulement de la défaite de ceux-ci. L'auteur veut simplement indiquer par ce mot que les Chrétiens succombèrent sous la violence du choc des Infidèles; quand il veut préciser les résultats de cette attaque, il emploie les mots captus, occisus, contritus, en les appliquant aux divers contingents qui furent pris, tués ou mis en déroute. Il n'y a donc pas lieu d'incriminer l'acte du 31 mai 1243, et il est certain que la mort de Vieille Bride se produisit avant le 31 mai 1243, et non à la bataille de Gaza.

En dehors des événements de Terre Sainte, le court magistère de Vieille Bride est peu connu. Nous savons seulement qu'il maintint énergiquement les droits de l'Hôpital sur les Teutoniques (43), qu'il acquit de Jean III d'Ibelin, seigneur d'Arsur, la moitié des moulins des Trois Ponts près d'Arsur (44), qu'il s'efforça, par des accords et des arbitrages, de régler les difficultés qu'il avait avec les Teutoniques (45) et les Templiers (46), et que dans les pays de langue allemande la générosité des donateurs en faveur de l'Ordre ne se ralentit pas (47).

C'est également sous l'administration de Vieille Bride que prit fin la querelle qui divisait l'Ordre et Bohémond V à l'occasion du château de Maraclée ; nous avons exposé plus haut (48) la première phase de l'affaire, qui avait donné raison aux Hospitaliers contre Bohémond défaillant, et avait mis les parties en hostilités déclarées. Sur appel du prince, le S. Siège avait chargé, le 11 février 1238, son légal Giraud de Lausanne, patriarche de Jérusalem, de régler le différend, dont diverses circonstances avaient retardé la solution; mais la sentence définitive d'arbitrage n'intervint que le 18 novembre 1241, par les soins du légat Albert Rezato, patriarche de Jérusalem (49). L'Hôpital renonçait en faveur de Bohémond, moyennant une rente annuelle de 1 300 besants, à ses prétentions sur Maraclée et sur le Charnel, sous réserve des droits de Meillour, seigneur de Maraclée, qui, lorsqu'il aurait atteint sa majorité, serait libre de « faire ligeance » au prince ou à l'Ordre; s'il optait pour ce dernier, la convention devait être annulée de plein droit.

Vieille Bride était probe, simple, vertueux et fidèle observateur de la Règle. Tel est le jugement porté sur lui par les annalistes officiels de l'Hôpital (50). Il fonda, ajoutent-ils, trois maisons et augmenta les biens de l'Ordre. Nous n'avons, malheureusement, pour contrôler l'exactitude de leurs affirmations sur ces deux points, que des renseignements trop incomplets sur le développement administratif de l'Hôpital pendant le gouvernement de ce grand-maître ; mais il est permis de croire que les commanderies dont l'érection lui est attribuée devaient être allemandes, à en juger par l'accroissement territorial obtenu par lui dans les pays de langue allemande, accroissement dont nous avons déjà, à côté des progrès parallèles faits par les Teutoniques, eu l'occasion de signaler la persistance anormale.
Sources : Joseph Delaville Le Roulx. Les Hospitaliers en Terre Sainte et à Chypre (1100-1310). Paris, E. Leroux, 1904. In-8º, XIII-440 pages.
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Les Notes
1. Chorier, Le nobiliaire de la province de Dauphiné, III, 585. La Chenaye-Desbois, Dictionnaire de la noblesse (3e édition), XIX, 645.
2. Signalons cependant des divergences dans les armoiries des anciens seigneurs de Comps. Chorier leur donne comme blason : d'azur à 3 pals d'or, au chef de même ; Guy Allard [Nobiliaire du Dauphiné, 365) : pallé d'argent et d'azur de six pièces au chef d'or, et La Chenaye-Desbois : de gueules à l'aigle échiquetée d'or et de sable. Ce blason diffère de celui du grand-maître, qui portait, d'après les nobiliaires de l'Ordre : de gueules à l'aigle échiquetée d'argent et de sable.
3. Quatre localités du nom de Comps se trouvent dans la Drôme, le Gard, le Var et l'Ardèche, une dans l'Aveyron, une dans la Gironde, une dans l'Allier et une dans le Puy de Dôme.
4. Cartulaire, II, nº 1462.
5. Cartulaire, II, nº 2006 et 2079.
6. Cartulaire, II, nº 1934.
7. Voir plus haut, page 178.
8. Cartulaire, II, nº 2224.
9. Cartulaire, II, nº 2245.
10. Seule une trêve particulière, conclue par Bohémond d'Antioche et les Templiers avec Alep, expira en 1237, au lendemain de la mort du sultan d'Alep Malek el Aziz et de la transmission de l'autorité de celui-ci à un enfant de sept ans, Malek el Nacer Youssof, son fils. L'occasion parut trop favorable aux Templiers pour ne pas tenter de reconquérir Baghras et Darbessak; mais la chevauchée tentée par eux contre Darbessak aboutit à une sanglante défaite, le 24 juin 1237 (Matthieu de Paris, Chron. Majora, III, 405).
11. Voir plus haut, page 175.
12. Cartulaire, II, nº 2149.
13. Cartulaire, II, nº 2186.
14. Mai 1237, confirmation par Balian, seigneur de Sidon, de biens à Sidon. — Décembre 1238, donation de biens à Jaffa et à Ascalon par Marie de Jaffa (Cartulaire, II, nº 2160 et 2212).
15. Avril 1239 (Cartulaire, II, nº 2224).
16. 17 avril 1238 (Cartulaire, II, nº 2196).
17. Cartulaire, II, nº 1718 et 1911.
18. 10 et 16 mai 1238 (Cartulaire, II, nº 2199 et 2200).
19. Cartulaire, II, nº 2163 et 2174.
20. Poméranie : (Cartulaire, II, nº 2133 et 2192-3). Silésie (Lasov, Grobnig et Striegau) : (Cartulaire, II, nº 2192-3, 2195, 2214-6, 2238). Bohême : (Cartulaire, II, nº 2131 et 2203). Moravie : (Cartulaire, II, nº 2132 et 2191). Pologne : (Cartulaire, II, nº 2162, 2180 et 2194).
21. Dugdale, Monastère Anglic, VI, 797. Voir plus haut, page 34, note 3.
22. V. plus haut, page 180.
23. Cartulaire, II, nº 1462.
24. Cartulaire, Il, nº 2166. En novembre 1235 André Polin était grand-précepteur (Cartulaire, II, nº 2126), ce qui indique que Vieille Bride ne devint grand-précepteur qu'en 1236 ou 1237. Peut-être faut-il placer le début de son préceptorat à l'été de 1236, au moment où Bertrand de Comps succéda à Guérin. On sait que le grand-maître nouvellement élu désignait au choix du chapitre général le grand-précepteur qu'il désirait avoir à ses côtés; c'est ce qui a dû se produire pour Vieille Bride.
25. Cartulaire, II, nº 2224.
26. Haute-Loire, arrondissement et canton Brioude. Voir Cartulaire, II, nº 1462, 2166, 2212, 2224, 2245, 2274.
27. Il débarqua à Acre le 1 septembre 1239.
28. Continuation de Rothelin, dans Histoire occidentale des croisades, II, 539. La coopération du Temple et de l'Hôpital à cette bataille n'est attestée que par l'Estoire d'Eracles (Histoire occidentale des croisades, II, 414) ; il est cependant probable que les deux ordres, après avoir fait aux chevaliers des remontrances qui ne furent pas écoutées, prirent néanmoins part à l'action.
29. Continuation de Rothelin, 547.
30. Estoire d'Eracles, 419-20 ; Gestes des Chiprois, 122.
31. Gestes des Chiprois, 122.
32. Continuation de Rothelin, 553.
33. Estoire d'Eracles, 419; Continuation de Rothelin, 554.
34. C'était un allemand, d'après Matthieu de Paris (Chron. Majora, IV, 43-4).
35. Matthieu de Paris, Chron. Majora, IV, 141-3. Le grand-maître de l'Hôpital n'est pas nommé dans le texte ; l'éditeur de Matthieu de Paris l'a identifié en note avec Guillaume de Châteauneuf, et Rohricht (Gesch. des Konigreichs Jerusalem, 852) s'est approprié cette erreur. Nous savons, en effet, par un acte de juin 1241, que le grand-maître était alors Pierre de Vieille Bride (Cartulaire, II, nº 2274).
36. Rohricht, Gesch. des Konigreichs Jerusalem, 850-3.
37 Matthieu de Paris, Chronica Majora, IV, 139.
38. Matthieu de Paris, Chronica Majora, IV, 167-8 et 256.
39. Gestes des Chiprois, 126-7.
40. Mas-Latrie, Hist. de Chypre, I, 326-7 ; Chronique d'Amadi, 196.
41. Cartulaire, II, nº 2296.
42. In dicto bello coesa fuit tanta utriusque exercitus multitudo quod occisorum fuit numerus inestimabilis. Cecideruntque magister militie Templi et magister Hospitalis, et alii magistri ordinum, cum suis conventi-bus et sequelis, et dominus Walterus, comes de Bresna, captus, dominus Philippus de Muntforte occisus, et qui sub patriarcha militarunt contriti. Nec evaserunt de omnibus Templariis pre-ter octodecim, et de Hospitalariis sex-decim ; quos tamen pcenituit postea evasisse. (Matthieu de Paris, Chronica Majora, IV, 307-311).
43. Cartulaire, II, nº 2247 et 2270.
44. Cartulaire, II, nº 2274 et 2277.
45. Cartulaire, II, nº 2245.
46. Cartulaire, II, nº 2251 et 2276.
47. Donations à l'Hôpital : par les ducs d'Oppeln (Cartulaire, II, nº 2252-3, 2259, 2273), par Ludolphe de Steinfurt (Cartulaire, II, nº 2282), par la duchesse de Silésie (Cartulaire, II, nº 2283), par les comtes de Werle (CartuL, II, nº 2286) et de Tecklenbourg (Cartulaire, II, nº2288), et par le roi de Bohême Venceslas I (Cartulaire, II, nº 2292).
48. V. plus haut, page 175.
49 Cartulaire, II, nº 2184 et 2280.
50 Dugdale, Monast. Anglic, VI, 797. V. plus haut, page 34, note 3.

Sources : Joseph Delaville Le Roulx. Les Hospitaliers en Terre Sainte et à Chypre (1100-1310). Paris, E. Leroux, 1904. In-8º, XIII-440 pages.
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