Auger de Balben. 29 novembre 1160 — 11 mars 1162
A Raymond du Puy succéda comme grand-maître Auger. Tout ce qui le concerne est incertain, son nom de famille d'abord. Les historiens de l'Ordre, qui ne Pavaient rencontré dans aucun acte, l'ont appelé Auger de Balben, sur la foi des listes chronologiques placées en tête des Statuts, dans lesquelles la forme Balben, philologiquement inadmissible, est le résultat d'une erreur de lecture ou de transcription. Nous avons, en effet, dans deux documents, qui étaient inconnus à ces historiens, retrouvé la forme complète « de Balb (probablement Balbis) » qui ne peut avoir donné Balben (1). La patrie d'Auger n'est pas mieux connue ; on a fait de lui, sans preuves, un Dauphinois, né, disent dubitativement les généalogistes, à Risoul (Hautes-Alpes). Il est à remarquer que les anciens armoriaux dauphinois sont muets sur ce grand-maître, les armoriaux provençaux également. Il semble étrange qu'aucune famille de ces provinces n'ait cherché à se rattacher à lui, et n'ait revendiqué l'honneur d'un ascendant aussi illustre. Auger, cependant, semble bien être originaire du midi de la France ; nous savons, en effet, qu'en 1157 et 1158 il accompagnait Raymond du Puy, son prédécesseur, dans un voyage dans ces provinces, et ce fait paraît indiquer qu'il appartenait à cette région.Si, comme nous le supposons, il convient de chercher la patrie d'Auger en Provence ou dans les pays environnants, une seule famille, celle des Balbes, répond, au point de vue phonétique, aux données du problème. On sait que cette maison, riche et puissante antérieurement au milieu du XIIe siècle, à la fois provençale et piémontaise, vivait dans la région des Alpes-Maritimes, et fut la souche des comtes de Vintimille (2) ; est-il téméraire de chercher là la véritable origine du grand-maître, puisque celle qui lui a été donnée ne repose sur aucune donnée scientifique ?
La présence d'Auger aux côtés du grand-maître Raymond du Puy, en 1157 et 1158, est significative. Si, en 1157 à S. Gilles, siège du prieuré, le grand-maître est entouré du prieur et des principaux dignitaires du prieuré, parmi lesquels figure Auger (3), en revanche, l'année suivante, en Forez, la suite du grand-maître ne comprend plus que le prieur, le commandeur du Forez, les chapelains prieuraux et Auger (4). Cette marque de faveur, donnée à Auger, témoigne assez de l'estime dans laquelle il était tenu, et fait pressentir les hautes destinées que l'avenir lui réservait.
La date de la promotion d'Auger au magistère est incertaine. On a partout imprimé qu'au synode de Nazareth, en 1160, Auger s'était prononcé pour le pape Alexandre III contre l'antipape Victor IV; les sources qui témoignent de ce fait indiquent bien la conduite tenue par le grand-maître des Hospitaliers dans cette circonstance, mais sans le désigner nominativement (5). Il faut, pour atteindre un terrain solide, se reporter au premier acte émané d'Auger, daté du 29 novembre 1160 (6). Il est fort probable que le grand-maître tint au synode le rôle qu'on lui prête; peut-être même était-il déjà investi de cette magistrature en 1159, le dernier acte connu de son prédécesseur étant du 25 novembre 1158 (7). Mais aucune affirmation n'est possible, et, malgré de sérieuses présomptions, on ne saurait faire remonter le début de son magistère au delà de novembre 1160.
Le gouvernement d'Auger de Balben fut court ; la dernière mention connue est du 11 mars 1162, et la première mention de son successeur, Gilbert d'Assailly, du 19 janvier 1163 (8). Peut-on placer entre ces deux dates le magistère d'Arnaud de Comps, que les listes chronologiques des grands-maîtres signalent comme successeur d'Auger et prédécesseur de Gilbert d'Assailly, mais dont aucun document ni aucune chronique ne prononce le nom ? (9).
Il serait peut-être téméraire de repousser l'existence d'un grand-maître dont la tradition constante de l'Ordre a consacré le souvenir; mais, s'il a existé, il n'a pu exercer sur les Hospitaliers qu'une magistrature éphémère.
Il est fort difficile d'apprécier le rôle joué par Anger pendant qu'il gouverna l'Hôpital ; les éléments d'appréciation nous manquent. Les historiographes officiels de l'Ordre lui prêtent une profonde piété et une grande probité, et nous ne pouvons que nous en tenir à ce jugement, d'une bienveillance probablement excessive (10).
Sources : Joseph Delaville Le Roulx. Les Hospitaliers en Terre Sainte et à Chypre (1100-1310). Paris, E. Leroux, 1904. In-8º, XIII-440 pages.
— Vous pouvez voir le livre dans son intégralité à cette adresse : Archives.Org
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Les Notes
1. Cartulaire, nº 253 et 268. — Dans les transcriptions postérieures de ces actes cette forme est devenue « de Balbeio » et « de Balbeo. »
2. Voir sur ce point les ouvrages de Cais de Pierlas
3. — Cartulaire, I, nº 253.
4. — Cartulaire, I, nº 268.
5. — Recueil des historiens de France, XV, 763.
6. — Cartulaire, I, nº 296.
7. — Cartulaire, I, nº 270.
8. — Cartulaire, I, nº 304 et 317.
9. — Les historiens de l'Ordre (Bosio, Dell' Istoria, I, 225; Abbé Vertot, Histoire de l'ordre de Malte, I, 140, etc.) ont admis qu'il était Dauphinois comme Auger, mais sans aucune preuve ni même de présomption. On a vu que cette supposition était erronée pour Auger; elle est plus vraisemblable pour Arnaud de Comps, car, parmi les localités qui portent ce nom, l'une d'elles est dans la Drôme et faisait partie de l'ancienne province de Dauphiné. Voir plus bas l'origine présumée de Bertrand de Comps, grand-maître de l'Ordre de 1236 à 1239, et appartenant à la même famille qu'Arnaud de Comps.
10. — Dugdale, Monasticon anglicanum, VI, 796.
Sources : Joseph Delaville Le Roulx. Les Hospitaliers en Terre Sainte et à Chypre (1100-1310). Paris, E. Leroux, 1904. In-8º, XIII-440 pages.
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