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Etudes sur les Ordres des Hospitaliers, Malte et Rhodes
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Commanderie de Nomdieu
Département: Lot-et-Garonne, Arrondissement: Nérac, Canton: Laplume - 47

Domus Hospitalis Nomdieu
Domus Hospitalis Nomdieu

— La Commanderie de Nomdieu
L'hôpital de la Cavalerie, entre Ayguetinte et Castéra-Verduzan, fut fondé en 1160. Réunis vers la fin du XVe siècle sous le nom de « La Comandaria de la Cavalerie sive del Nomdieu » (bulle de 1701) ils furent administrés par le même Commandeur qui résidait habituellement au Nomdieu (Nomen Dei) au XVIIe et au XVIIIe siècle tout au moins.

Le Commandeur jouissait, comme ailleurs, des droits de haute, moyenne et basse justice. Comme curé (primitif, il avait la faculté de prendre en entier dîmes et prémices. La dîme constituait la plus grande partie de ses revenus. Pour le blé, elle consistait de 1 gerbe sur 10 à Saint-Vincent, mais de 11 gerbes sur 17 dans les terres de Nomdieu, Goulard, Poussac, Bonnefont, Mège, Caubiet. Et le Commandeur prenait en plus la 11e partie des menus grains pris aux champs, la 11e partie de la vendange, des lins et chanvres. Le recteur (curé chargé des services religieux) n'avait que le quart, le reste était attribué au Commandeur.

Ruinés par les protestants en 1592, le château et l'église de Nomdieu furent réparés par les soins du Commandeur de la Hillière (1622), mais ils furent vendus et démolis sous la Révolution, comme biens nationaux et rien d'autre ne subsiste aujourd'hui de ces constructions que ce qui reste dans les murs de la sacristie et (1) (11).
11. J. Bénahen : La Commanderie du Nomdieu, Toulouse 1914.
1. L'église actuelle, édifiée en 1875, sur l'emplacement de l'ancienne, porte un vitrail orné des armes des d'Esparbès de Lussan, seigneurs du Nomdieu, qui avaient donné plusieurs chevaliers à l'Ordre de St-Jean. Le dernier représentant de cette famille, possesseur du domaine de Jauquet à St-Mézard, mourut au Nomdieu en 1889 (Renseignements obligeamment fournis par le Dr. Barailhé, maire de St-Vincent de Lamontjoie et M. Henri Pujos, propriétaire à Saint-Mézard.

Léon Malvin de Montazet fut le 61e Commandeur depuis la fondation de cette Commanderie. Nommé en 1767, il ne prit la charge magistrale que le 6 janvier 1769. Devenu receveur au Grand Prieuré de Toulouse en 1788, le Commandeur du Nomdieu survit à la dispersion de son Ordre, à la suppression de sa Commanderie.

Son attitude pendant la Révolution est admirable. Il porte constamment sa croix, refuse de faire partie de la garde nationale de Toulouse.
« J'habite toujours, écrit-il, les routes des monts Pyrénéens ; je vois pourchasser, emprisonner et guillotiner les hommes qui sont à ma droite et à ma gauche ; mes chers confrères de Toulouse qui ont remis nationalement leur épée, renoncé à leur croix et orné leur chef de l'apanage tricolore pour conserver, disent-ils leur vie, sont dispersés. J'ai conservé mon épée, ma croix et mon chapeau ; nul doute que je ne leur doive ma vie.... j'ai défendu mes dehors pied à pied et je me conserve encore intact au milieu des tonnerres qui grondent et qui frappent autour de moi. J'ai licencié ma maison, congédié mes valets, dans l'impossibilité de les payer et mis bas ma livrée.

Une franche gouse fait bouillir mon pot, je m'abreuve de vin de hautin et m'alimente d'ours et de chevreaux, mais je suis encore libre dans mon pourpoint. » Il ne cesse d'adresser des réclamations aux autorités de Toulouse, Luchon, Saint-Gaudens, Montréjeau et signe Chevalier de Montazet, Commandeur de l'Ordre de Malte. Il reste 18 mois à la prison de Saint-Gaudens par le fait qu'il porte la croix ; on le rendrait à la liberté s'il la rendait, mais il refuse. Finalement relâché il s'établit à Saint-Bertrand où ces attributs vestimentaires et son attitude éveillent aussi les soupçons des autorités. » Il mourut en 1820, presque centenaire, dans l'Aveyron (2).
2. D'après J. Bénaben (ouvrage cité) il mourut à Pachin, canton de Villefranche (Aveyron), le 15 décembre 1820 à 96 ans.

Les possessions de l'Ordre de Malte dans le Lectourois
I. Saint-Basil (paroisse de Saint-Mézard)
Dans le hameau de Saint-Basile, situé à 1 km 500 à l'Ouest du village de Saint-Mézard, la carte de Cassini ne mentionne pas d'église.
Pourtant, la tradition orale, au début du siècle encore, plaçait une église en ce lieu.
Chapelles :
— N.-D. de Pitié.
— Saint-Blaise
— L'Hôpital Saint-Jean.
Ce sont trois chappelles rurales.
Les pénitens blans sont en la chappelle Saint-Blaise.
Pour l'hospital Saint-Jean, c'est une chappelle de Malthe qui dépend de la commanderie de Tolose.
Il y avait autrefois messe matinale.
Sources: Bulletin de la Société d'Histoire et d'Archéologie du Gers, page 62, 36e année. Auch 1925

Aux preuves matérielles (1) et écrites (2), réunies depuis ces dernières années, viennent s'ajouter celles fournies par les archives du Fonds de Malte. (3)
1. Les travaux pratiqués dans le potager en 1930 par Léon Cadéot ont, mis à jour des colonnes de pierre ayant appartenu à l'ancienne église, et de nombreuses, sépultures examinées par le Dr. de Sardac, alors président de la Société Archéologique du Gers.
2. Les livres terriers de 1620 et 1673, de la Commune de Saint-Mézard signalent « les terres, jardins, patus, etc. confrontant aux masures de l'église. »
3. La Ville de Lectoure possède deux précieux registres Dimaîres de la Commanderie de la Cavalerie ; ils constituent deux imposants volumes avec plans détaillés et coloriés, de 802 pages de format 0 m. 37 X 0 m. 53 et d'un poids approximatif d'une trentaine de kilos. C'est à l'obligeance de M. André LAGARDE, archiviste de la ville, que je dois de les avoir consultés à loisir. Je tiens à lui exprimer tous mes remerciements.


« Il existait autrefois, disent celles-ci, une chapelle dédiée à Saint-Basile, qui a donné sans doute au dimère le nom qu'il porte aujourd'hui, et que le Commandeur faisait desservir et dont il ne reste aujourd'hui que les fondements à la faveur de la faculté que les voisins ont eu d'en emporter les pierres pour bâtir leurs maisons. Depuis longtemps, le service s'acquitte à Saint-Mézard par le curé de cette paroisse, (auquel) aujourd'hui le commandeur abandonne pour son honoraire un parsan appelé encore de Saint-Jean. »

Les documents que nous possédons, nous transportent malheureusement à la fin du XVIIIe siècle, sans nous renseigner autrement sur l'histoire de l'église disparue (4).
4. Le Fonds de Malte de Toulouse (archives de l'ancien Grand Prieuré) peut contenir ces renseignements.

Conformément à l'arrêt du Grand Conseil du 12 septembre 1779, décidant de procéder à un nouveau bornage des possessions de l'Ordre, assignation fut donnée le 28 novembre 1781, « aux décimateurs co-décimateurs riverains du dîmaire de Saint-Bazille de se rendre sur l'emplacement de l'ancienne église pour assister à ces opérations. » Cet arrêté ne visait pas spécialement le dîmaire de Saint-Basile, mais toutes les possessions de la Commanderie de La Cavalerie dont il dépendait (5).
5. « Louis, par la grâce de Dieu Roy de France et de Navarre à tous ceux que ces présentes lettres verront Salut savoir faisons, dit le verbal de bornage, il plut à notre dit Conseil ordonner que les bornes précédemment placées pour limites de justice, fiefs, terres, prés, bois, vignes, châteaux, métairies, églises, cimetières et dîmeries de la dépendance de la Commanderie de la Cavalerie seront en présence des Seigneurs et propriétaires riverains relevées et remplacées par des pierres de taille d'un pied carré sur trois pieds de hauteur, et marquées d'une croix de Malthe.

L'opération de bornage ordonnée « à la requête de l'illustre et religieux frère Léon Malvin de Montazet », Commandeur de l'Ordre Saint Jean de Jérusalem habitant en son château du Nomdieu (6), se déroula, dans la journée du 6 Décembre 1781, en la présence effective du Commandeur, assisté de Dominique Pierre Calviae Nozières, feudiste et géomètre arpenteur. « Sur le local même de l'ancienne église de laquelle il ne reste que les fondements size dans la juridiction de Saint-Mézard, Sénéchaussée de Gascogne, ressort du Parlement de Bordeaux, évêché de Lectoure », le feudiste donne lecture à 8 heures du matin, aux nombreux témoins réunis, de l'arrêté du Grand Conseil du 12 Septembre 1779, prescrivant le bornage, et du procès-verbal de la visite prieurale du 16 Septembre 1763, dans lequel il est dit « que l'Ordre de Malthe jouit du membre de Saint Bazile, dans la juridiction de Saint-Mézard, qui consiste en Dîme qui se paye de toute sorte de grains et vins à raison de dix un que le sieur Commandeur perçoit en entier, même les novalles (7) dans tout le dit quartier et Dîmaire de Saint Bazille où il y a encore quelques masures d'une petite église dédiée à ce Saint, de laquelle l'Ordre était prieur et curé primitif, et prenait l'entière Dîme, tant dans le dit quartier de Saint Bazille que dans un Parsan appelé de Saint Jean, que les Commandeurs ont Relaché anciennement aux curés de Saint-Mézard, à condition de faire le service divin et administrer les sacrements aux habitants du dit quartier et Dixmaire de Saint Basille. » Ce rapport rappelle de plus que « le Curé Rison, oubliant avec le temps le titre auquel il avait l'entrée dans le Dîmère, de l'Ordre de Malthe et s'établissent Curé de St Bazille, s'empara des novales et étendit sa prétention sur le quart des fruits décimaux, et que, si le novateur eût pu s'étayer de l'usage quarantenaire l'Ordre eût perdu sous peu d'années son dîmaire de St Bazille. Le Commandeur de Vintimille Monpezat, qui se trouva heureusement sur les lieux, arrêta heureusement l'incursion par un arrêt du Parlement de Bordeaux (1er Décembre 1666), dont il recommanda dans le verbal de ses améliorissements à ses successeurs de perpétuer la mémoire. »
6. La Commanderie du Nomdieu dépendait de celle de la Cavalerie dont elle ne fut d'abord qu'une annexe et les Commandeurs résidaient au Nomdieu. La Cavalerie (aujourd'hui Laclaverie) se trouve dans la commune de Castéra Verduzn (3 kilomètres au nord).

Que les dîmeries dépendantes de la Commanderie de la Cavalerie, soit comme percevant seules les dîmes ou seul fruit prenant, soit comme co-décimateurs seront également bornées d'une pierre de même dimension que les précédentes, sur une face de laquelle sera gravée la Croix de l'Ordre et sur l'autre le mot Dîme, sauf aux co-décimateurs qui voudront entrer dans les frais de bornage et arpentement de pouvoir placer sur les deux autres faces, de la même borne, le chiffre en armes de leurs bénéfices.
Qu'il en sera mis de pareilles partout où il en manquera, et où il sera jugé nécessaire d'en établir pour la division des angles, comme aussi que les dîmères qui n'auront pas été bornés le seront de la même manière. Ordonner pareillement que les limites des terres et justice seront bornées par des poteaux marqués de croix, suivant l'usage général de notre Royaume, que les directes et fiefs de la dépendance de l'Ordre qui seront enclavés dans les terres et justices d'autres seigneurs seront bornés d'une pierre de taille d'un pied en quarré, ou environ sur trois pieds de haut enterrée de manière qu'elle n'ayant que 18 pouces au-dessus du niveau du terrain sur une face de laquelle sera gravée la croix de l'Ordre de Malthe et sur l'autre le mot fief afin qu'aucun seigneur n'en veuille inférer quelque acte attentatoire sur ses droits, sauf au Seigneur haut justicier qui pourrait avoir la directe en partage de l'Ordre de Malthe. »

Bien que modeste en étendue, le dîmaire de St Basile — comparable disent les archives, à celui du Pergain — évalué à 1449 lattes 1/2 et 1/8 de circonférence (8) (ou 3079 toises, 5 pieds, 6 pouces) correspondait en gros à la section A (dite de St Bazile) du plan cadastral actuel, diminuée des parcelles de Lestagnac et du Moulin de Lussan, séparées par la Peyrigne (ancienne voie romaine) du Gleyza de Ste Bazile. Par contre il s'accroissait du « parsan de St Jean » ou de Montsanjouan que l'Ordre de Malte avait cédé aux curés de St Mézard, depuis que l'église de St Basile était tombée en ruines. Il ne fallut pas moins de trois journées de travail pour planter 32 bornes « toutes d'une bonne et belle qualité et pierre dure bien et proprement taillée, ayant chacune environ 3 pieds de longueur sur 1 pied au moins de face, ....plantées de manière qu'elles ne soient élevées au-dessus du terrain que d'environ 18 pouces.... et toutes marquées sur la face qui Regarde le dit Dîmère de St Bazile d'une croix de Malthe et sur la face opposée soit gravé en creux le mot Dixme, afin que tant par le présent que pour l'avenir on ne puisse évoquer endoute que les dites 32 bornes n'ont été uniquement placées que pour marquer les lignes qui divisent le dit dixmère de St Bazille et le petit Parsan de la Peyrigne dépendant diceluy d'avec les autres dîmères Riverains, déclarant les fontiers avoir toujours vu et ouï dire, à leurs devantiers que les limites dudit Dixmère ont toujours été telles qu'elles viennent d'être bornées.... et que Messieurs les Commandeurs de la Cavalerie ou de l'Ordre de Malthe ont toujours de tous temps (sic) perçu en seul, tous les fruits décimaux de la dite paroisse de St Bazille.... généralement tous les grains qui se lient en gerbe de dix un, et pour le vin, lin et chanvre, et généralement de tous les grains qui se ramassent dans le dit Dixmère de Onze un, le tout quérable par le décimateur sur les champs. »
7. ....Novales ou Novalles : cultures établies sur des défrichements récents.
8. L'arpenteur précise qu'il s'agit de la latte courante du pays valant 18 pans (le pan équivalent à 8 pouces, 6 lignes, pied de Roy). Selon Dralet qui ne fait pas mention de cette mesure (Plan détaillé de Topographie du département du Gers 296) la latte vaudrait 3 mètres 95.


De l'emplacement de la vieille église disparue « de laquelle nous n'avons trouvé exister que les fondements élevés, certains endroits d'environ 2 pieds au-dessus du terrain entourés de patus dépendants de la dite église » les opérateurs toujours assistés du Commandeur Léon Malvin de Montazet, se transportèrent à la métairie du Tuco où fut plantée la première borne, sur les témoins de brique d'usage ; à la limite de ce domaine et de la Peyrigne, on plaça les autres le long de cette route, et dans le bois de la Paravisse, les dernières remontant au Tuco par les métairies de Bourdouillet et de Salon. — Toutes ces bornes, disposées à des distances inégales, selon les irrégularités du terrain et les « Confronts des Riverains »furent « plantées en la présence gré et consentement des nombreux riverains réunis : Messire Joseph baron d'Esparbès de Lussan, ancien capitaine de grenadiers du régiment de Provence, Chevallier de l'Ordre Royal et militaire de St Louis, Seigneur de St Mézard et autres lieux, habitant en son château noble de Jauquet, tant à sa dite Qualité de Seigneur de St Mézard que comme grand fontier du dixmère de St Bazille, du sieur Jean Roussel, procureur fiscal deladite juridiction de St Mézard, de M. Jacques de St Géry prêtre et curé de St Mézard, habitant sa maison curiale de Notre Dame Desclaux et codécimateur de la paroisse de St-Mézard. »

Ils étaient assistés par un certain nombre de marqueurs (9).
9. ....Jean Juzan tisserand et Jean Bessières ménagers, marqueurs dudit dixmère, Pierre Gaure ménager marqueur aussi du dixmère de St Bazille pour l'Ordre de Malte et fontier dicelluy, Jean Barrère meunier au Moulin de Pouy, Louis Baudon, ménager à Astors paroisse de Baulens, juridiction de Ligardes, Louis Descrimes faisant son bien au Sabathé, Joseph Cadéot faisant son bien habitant de St-Bazille, Joseph Lacapère bordier de la métairie de Coulom, Joseph Dupin maçon, Pierre Barbelanne charpentier, Joseph Dubedat trasseur, Anne Gastebosc veuve de Pierre Dupouy quand vivait charpentier habitant de Mont San jouan, Joseph Laffont tailleur habitant du Sabathé, Joseph Serret domestique du Château de Jauquet, François Jougla, Pons Drapé, Pierre Chapès ménagers habitants du masage de Broche, Jean Bourgade habitant du masage du Jougla, du sieur Heylie Bouet, bourgeois habitant de Pouy Carregelard, de Monsieur Jean Gouragne curé de la paroisse de Pouy Carregelard, Joseph Pouydebat, prêtre, docteur en théologie, curé de Berrac, de Monsieur Henry Larroche prêtre docteur en théologie et curé de la paroisse de Roquelaure habitant à Lamontjoie et Messieurs du Vénérable Chapitre de La Romieu.... tous lesquels ce sont soussignés du moins ceux qui ont sçu.....

Avant la séparation, lecture fut donnée par Calviac, Nozières en présence du Commandeur Malvin de Montabet, du rapport de clôture rappelant les droits de l'Ordre de Malte et enregistrant le consentement des témoins, présents et absents, tels « Illustrissime et Révérendissime Seigneur Messire Louis-Emmanuel de Cugnac, évêque et seigneur de Lectoure », et Monsieur de Virazel, président à mortier au Parlement de Bordeaux, Seigneur Marquis de Pouy Carregelard et Roquelaure » qui n'a pas comparu quoique assigné pour ce faire ny personne pour lui. » C'est pourquoi, ajoute le rapporteur, avons donné acte de sa non comparution au Seigneur Commandeur de Montazet pour luy servir et valoir atelles fins que de raison. »

Qui se serait douté, en cette fin d'année 1781, que douze années plus tard ces solennelles proclamations s'évanouiraient, que les bornes de pierre voleraient en éclats sous le marteau des révolutionnaires (10) et que le puissant Ordre des Chevaliers de Jérusalem lui-même disparaîtrait comme la plupart des Institutions de l'Ancien Régime ?
10. ....Deux de et ses pierres marquées de la Croix de Malte et du mot Dime, cachées dans les bois de la Paravisse au sud de la route de St-Mézard à Pouy Roquelaure servent encore de bornes limiles pour les communes de Saint-Mézard, Pouy Roquelaure et Berrac.

II. — L'action personnelle du commandeur de Montazet
A la vérité, l'Ordre lui-même n'était pas sans connaître des difficultés. « Il est de principe, écrit le Commandeur de Montazet, qu'il n'est point de mouvement sans force motrice ; l'empire dont la population serait la plus étendue ne sera qu'un colosse sans vie, s'il manque de facultés pour armer les bras auxquels il commande.

Les Suisses ont consacré le principe par un dictum de tout pays et de tout état, point d'argent, point de grisons. Les engagements du souverain de Malte avec ses alliés le constituent dans des dépenses qui excèdent de beaucoup ses moyens. Ses dépenses sont de tous les moments et rien de plus casuel et de plus incertain que ses Revenus. » Il serait faux de croire que la perception des dîmes rencontrait partout l'acceptation passive des assujettis, et que les premières résistances étaient apparues à la période prérévolutionnaire. Dans le Membre de la Cavalerie (ou du Nomdieu), le seul qui nous occupe, les contribuables de Villa de Vézac (St-Vincent de Lamontjoie) créèrent les plus grandes difficultés aux décimateurs, pendant trois ans de suite (1600-1602) ; les gerbes n'étaient pas entassées pour rendre le dénombrement impossible, et lorsque les procureurs se rendaient devant les maisons, ils trouvaient les portes closes ou des femmes qui prétendaient ne rien savoir (11).
11. J. Bénahen : La Commanderie du Nomdieu, Toulouse 1914.

En juillet 1602, frère Jean Rigal, procureur du Commandeur « requis par le syndic des manans et bien tenants de percevoir dans les sols et ayres le dixme des fèves, garousses, millet et autres grains de l'année courante 1602 et précédente 1601 qu'ils avaient refusé de payer, se rend en compagnie de Pierre Coulau, notaire royal à Lamontjoie au domicile des tenanciers avec deux chevals pour charrier et porter le dix un dans 17 métairies. Le Commandeur, dans un procès en féodale intenté aux récalcitrants obtint l'arrêt suivant « Les tenanciers propriétaires et leurs métayers seront tenus chaque dimanche durant le temps de la récolte des blés, vins et autres fruits dixmaires, aller ou envoyer, déclarer au Commandeur, et en son absence, à ses vicaires ou leur commis, les jours qu'ils devront faire emporter les gerbes, vendanges et autres fruits dixmaires de leur champs, vignes et autres possessions dixmaires du Commandeur. » Après arbitrage du Parlement de Toulouse (4 décembre 1602) il est stipulé que les prélèvements seront faits conformément à l'ancienne coutume « Pareillement est accordé et convenu que le droit de dixme de la vendange sera payé dans les vignes du dixmaire en raison de 11 charges 1, avec expresse condition qu'il ne sera loisible aux tenanciers d'emporter prendre ny enlever clandestinement de jour ny de nuit, à cachette ny autrement, ni en aucune sorte les dits fruits sans avoir payé le droit de dixme, en la forme susdite et sans au préalable avoir mis les gerbes en loubats de 12 gerbes et la pile de 36, et le restant en monceaux, patocs ou poignées, le plus également faits qu'il se pourra. »

Plus tard, en 1746, Mathieu Ganduque, prêtre et docteur en théologie, curé de Saint-Mézard, contesta au Commandeur de Roquette Buisson les novales de la terre de Cassaigne (12) comme trop proches de Saint-Mézard qu'il desservait, pour ne pas lui appartenir. Il fallut faire établir par devant Me Mazères, Conseiller du Roy à Lectoure, qu'en l'absence d'actes, la présomption attribue au Commandeur les dîmes et novalles de tout le dîmaire de Saint-Basile, dont faisait partie la terre de Cassaigne, et « que l'Ordre de Malthe a de tout temps prélevé seul la dîme à l'exclusion du curé de Saint-Mézard. » Ce dernier ne s'inclina pas sans résistance, mais le douze novembre 1751, le curé de Saint-Mézard déclara, dans le presbytère du Nomdieu, reconnaître les bons droits du Commandeur et renoncer à la faculté d'interjeter appel. » Il est possible qu'à la fin du XVIIIe siècle ces bons droits fussent de plus en plus contestés.
12. Désignation d'une parcelle du Bois des Paravisses sur la route de Saint-Mézard à Pouy Roquelaure.

Dans l'exposé des considérations qui avaient inspiré l'idée de procéder à un nouveau bornage, il ne semble pas que le Commandeur Léon Malvin de Montazet, en 1782 encore, ait laissé transpirer les craintes quant à la solidité d'un organisme ancien et dont tout attestait la puissance. La tâche d'un Commandeur est ingrate, mais le dernier Commandeur, homme d'action, n'entend rien abdiquer de son autorité ; il défendra de tout son pouvoir, les droits et prérogatives de l'Ordre et saura justifier son attitude. Pour déterminer le Grand Conseil à reprendre le bornage de la Commanderie de la Cavalerie, effectué 20 ans auparavant, il fallait faire accepter cette nécessité. Il ne dédaigne pas de s'expliquer avec quelques longueurs dans l'Introduction de son ouvrage de Nivellement (13).
13. Cf. supra, note 3.

« On s'étonnera sans doute, écrit-il, du volume de ce verbal de bornage et m'accusera d'un amour désordonné pour l'infolio ; on s'affermira dans ce jugement lorsqu'on sera instruit que le verbal de Bornage de la même Commanderie, fait sous le Commandeur de Roquette Buisson ne contient que 44 pages et qu'il s'opéra dans 30 jours : peut-être se sentira-t-on pressé d'enchérir sur les censures dont la vénérable langue (14) m'a frappé pendant plusieurs années sur les vociférations anoblies du caractère sacré de délibérations capitulaires, lorsqu'on apprendra que ce même verbal consommé par un notaire dans un mois a Resté dans mes mains six ans pour recevoir sa pleine exécution (15).
14. On désignait sous ce vocable la langue (ou division territoriale) de Provence, la plus ancienne de France.
15. Dans le même Procès-verbal le Commandeur poursuit : « Prévenu par voie d'amy en 1775 que MM. Les procureurs de la Vénérable langue m'avaient porté sur la liste des administrateurs négligents, je me présentai au Vénérable Chapitre pour demander des Commissaires.... je lui confiai que dans mon opinion un verbal d'ameliorissement ne doit pas contenir seulement les relations des réparations et améliorations qu'un Commandeur a fait dans les fonds et bâtiments de la Commanderie.... mais qu'étant ordonné pour assurer les droits et la propriété de l'Ordre, pour les affranchir des grivelèrent de ses Voisins ou de la prétention des hommes.... Ce n'était répondre ny à la loy ni à la confiance de la mère qui se repose de sa propriété sur la vigilance et l'amour de ses enfants que de peubler nos archives de verbaux d'améliorissement improductifs du principal objet pour lequel ils sont ordonnés.... j'établis d'après l'esprit de la Loy qu'un verbal d'améliorissement doit rappeler les titres et les authorités qui établissent les droits et la propriété qu'il annonce ; remplirait-il le premier degré d'Instruction s'il n'était Revêtu des formes prescrites par les loix de chaque pays pour faire foy en justice, afin de même qu'un gouvernement bien Réglé n'a besoin à la première hostilité qu'un voisin ambitieux exerce sur son territoire que d'ouvrir les arsenaux pour assurer ses sujets, un administrateur n'ait qu'à fixer ses Regards sur un verbal d'améliorissement pour s'armer et s'assurer du sort de la demande qu'on lui fait ou qu'il forme... »


Pourvu de la Commanderie en 1767, tous les Bâtiments, soit Châteaux, métairies, moulins sans compter les églises avaient éprouvé dès 1773 ce que peut la vigilance d'un administrateur dont les moyens secondent la volonté ; les églises de la Commanderie avaient été proposées plus d'une fois aux évêques voisins, comme objet d'émulation, les terres avaient pris la couleur qu'elles reçoivent d'une culture soignée, tout ce qui dans l'ordre des vignes avait acquis le droit par l'âge ou le mauvais travail de ne plus produire.... avait été renouvelé dans le meilleur cépage.... les prairies et les bois, précédemment livrés à la discrétion du public et à la dépaissance de tous les bestiaux et animaux de la Banlieue étaient défendus par les murs ou de larges fossés, bordés de hays ; ils n'étaient pas seulement affranchis de la déprédation des maraudeurs par la surveillance des gardes reçus dans les maîtrises et investis de bandouliers ; il avait fallu encore recourir à l'authorité des arrêtés du parlement pour arrêter la prétention des maisons, masages et communautés qui se disaient en usage de temps immémorial de prendre leur chauffage et d'avoir la dépaissance des bestiaux dans les bois et preds de la Commanderie ; tout jusqu'aux grands chemins et aux chemins vicinaux retraçait la présence d'unadministrateur actif amy de l'Ordre et Cabré contre la Rapine et l'abus. La faction n'ignorait pas que la Commanderie de la Cavalerie, délabrée précédemment de tous les bouts, n'ait changé de forme et ne fut celle du prieuré de Toulouse qui était dans le meilleur état.... » Après avoir fait état des attaques de ses ennemis, le Commandeur poursuit : « Qu'on compare le verbal de bornage de 1742 avec celui que je Remets et on se convaincra aisément que si.... j'ay ouvert 20 instances avec autant de personnages de tout état, dans le nombre desquels je compte le domaine.... c'est que le verbal de 1742 a jugé plus court et plus commode de laisser ces fusées à démêler aux successeurs de son cometant et qu'il a voulu se faire un mérite auprès de luy d'une célérité qui est devenue pour moy une pierre d'achoppement.... J'ai vuidé toutes les instances que j'ai engagées, soit avec le domaine, les Communautés, les seigneurs et particuliers non par des mézoterminé qui laissent toujours après eux des embargos et des queues, mais par des désistements authentiques revêtus de toutes les formes judiciaires et que j'ai reportés dans mon verbal pour que la génération présente en juge et que mes successeurs en profitent.... Le verbal de 1742 qu'on m'oppose pour avoir été fait dans 30 jours et pour ne contenir que 44 pages, loin d'être de quelque instruction pour un administrateur, ne peut au contraire que l'égarer ; rien n'établit plus évidemment les vices dont cette procédure est infectée que de n'avoir éprouvé ni opposition, ni difficulté, tandis que je n'ay pu borner un champ, un moulin, une église sans éprouver une opposition ou une discussion qu'il a fallu vuider par voye de conciliation lorsque j'ay pu éviter de la porter en justice. » Telle était la tâche ingrate qui s'offrait au dernier Commandeur à la veille de la Révolution.
En dépit d'innombrables obstacles, il accomplit courageusement et loyalement son devoir.

Après la suppression des ordres religieux par un Décret de la Constituante (13 février 1790) le dernier Commandeur, Malvin de Montazet, adresse une lettre de protestation « pour démontrer que son Ordre n'était pas un Ordre ecclésiastique, mais une Puissance souveraine ayant droit de conserver son existence et ses biens. »

« L'Ordre de Malthe, écrit-il, n'a jamais fait un corps de l'état comme ses biens n'ont jamais pu être ecclésiastiques.... puisqu'il est formé de 13 nations, qui ont concouru dès son origine comme elle concourent encore, à le doter, à le former et d'où il résulte par son essence même, et sa formation qu'il ne peut plus dépendre ni appartenir à une de ces nations qu'à l'autre.... On ne peut pas plus douter que cet Ordre ne soit un Etat, une Puissance souveraine puisqu'elle a ses sujets, sa législation, son gouvernement et son territoire sur lequel elle exerce librement tous les actes de la pleine souveraineté. Et quoiqu'en dise M. Camus qui veut que cet Ordre soit une portion du clergé de France.... cet Ordre est avoué et reconnu par toutes les Puissances de l'Europe pour tenir rang parmi Elles, et il traite en conséquence, avec Elles, par voie des Ambassadeurs, comme elles entretiennent de leur côté des envoyés à la Cour de Malte avec le caractère des Ministres ou d'ambassadeurs, selon les missions dont ils sont chargés. Les biens que possède l'Ordre de Malte en France, comme dans tous les Etats chrétiens, ne peuvent pas être plus réputés ecclésiastiques que l'Ordre ne peut faire un corps privilégié du royaume puisque ses biens ne lui ont été donnés que pour l'armer et le soutenir en activité des forces employées à la protection de la cause commune. D'où il résulte que les biens de l'Ordre de Malte sont le contingent que chacune des 13 Puissances intéressées lui payent pour la Sûreté de ces Etats, la protection de son commerce et la liberté des mers. Or, il est impossible d'appliquer une destination ecclésiastique à des biens donnés pour faire la guerre. »

III. — Les dépendances territoriales de la commanderie de la Cavalerie
Les deux importants registres dîmaires, portant le titre « Arpentement et Bornage de la Commanderie de la Cavalerie » déposé aux archives de la mairie de Lectoure donnent les nomenclatures suivantes des membres en dépendant :
A. — Registre I
1. Nomdieu (7 cartes) château et jardin, moulin, église et cimetière, métairie de Saint-Denis et dépendances, bois du Pourquerat.
2. Goulard, bois du Pourquerat, à Goulard, paroisse de Nomdieu.
3. Sabathé, paroisse des Fieux.
4. Gourragne, paroisse de Caunes, près Condom.
5. Abrin, église, cimetière, bois d'Abrin, de Tressens.
6. Aurens, église de Saint-Lupert, cimetière, pâtus.
7. La Cavalerie, église, cimetière, château, métairie de la Brogate-Le Prador (Saint-Puy), moulin de la Cavalerie, métairie et bois de Lachore (Aiguetinte), église et cimetière de N.-D. de Lachore.
8. Valadouze (Jegun).
9. Arpentian (Jegun).
10. Saint-Jean de Sommeville (Lectoure).
11. Lagrange Martin (Casteinau d'Angles).
12. Bardagnères (église et cimetière de Lhospitalet).
13. Sainte-Christie, église et hôpital de Sainte-Christie.
14. Lande ou Barthe de l'hôpital de Sainte-Christie.
B. — Registre II
1. La Cavalerie (compléments).
2. Gallard (corruption de Goulard) annexe de Bax en Brulhois.
3. Pergain, champ de la Caussade, près la métairie du Brana.
4. Dobèse, Parsan de Dobèse, terre de Font Cave de la métairie de Couradilles.
5. Lamontjoie, Parsan de Gade, Lembéjat, des Capots, de Dieusères et Revignan.
6. Saint-Vincent ou Villa de Vézac, église romane de l'Ordre de Cluny (1064) passée aux hospitaliers de Jérusalem en 1778. — Nombreuses dépendances : 395 hectares.
7. Tressoulet de Martet (de la paroisse de Cazeaux).
8. Tressoulet de Saint-Hilaire de Villars (ou Saint-Lary), 93 hectares. Château de Saint-Lary, appartenant au XVIIIe siècle à la famille de Bernard.
9. Dixmère du Metje (paroisse de Bannefont).
10. Dixmère de Bonnefont (église Saint-Arnaud). Propriété du Couvent du Paravis, passe aux Templiers, puis aux Hospitaliers. 11. Dixmère de Poussac (église Saint-Frix).
12. Dixmère de Marignac ou de Daubiac dans la paroisse de Marignac, juridiction de Baulens (et uni à Baulens après la Révolution).
13. Saint-Basile (canton de Saint-Mézard).

Affermé le 30 avril 1731 par le Commandeur Amédée de Cays au sieur Dugarros, avec les parsans de Pouy, Daubèze, Le Pergain et Revignan de Lamontjoie, pour la somme de 360 livres.

Il ne sagissait pourtant là que des possessions les plus importantes. En Brulhois, J. Bénaben signale encore, d'après les fonds de l'Ordre de Malte du Grand Prieuré de Toulouse (11), les dîmaires de : Bax (de Vallibus, de badis). Le château de Bax, grosse tour carrée sur la route de Nérac à Astaffort, apanage d'une famille de ce nom, branche de la famille de Galard, était séparé par le cimetière de l'église romane, dont on peut voir encore la porte en plein cintre et deux croix de Malte gravées sur le mur nord.

Saint-Martin de Caubiet (au nord de Nomdieu) rattaché à Saint-Lary, annexe de Saint-Vincent.
Roussère, à l'ouest de Laplume.
Saint-Fierre de Cazaux, au sud-ouest de Laplume (terres du Hillo, chapellenie disparue d'Urre).
Montcaup (Mons Calvus, plusieurs terres avant le XVIe siècle).
Sainte-Colombe (château seigneurial). Fiefs importants signalés au XIVe siècle comme appartenant à la Commanderie de Nomdieu.
Lasmourèdes, près de Brax.
Moulin et hôpital de Tournezon (ou de Gouraigne), sur la Baïse près de Condom.
La Tour d'Avance (près de Durance). Sur la rivière l'Avance : importantes possessions par leur étendue, nombreuses fermes et moulins. Haute tour carrée à quatre étages et meurtrières.

IV. — Organisation générale de l'Ordre de Malte
Vers 1048, des marchands italiens obtinrent la permission de bâtir à Jérusalem, dans le quartier chrétien, un hôpital et une église pour les pèlerins qui arrivaient d'Occident près du Saint' Sépulcre.

Pierre Girard gouvernait cet hospice lors de l'entrée des premiers Croisés (conduits par Godefroy de Bouillon) à Jérusalem, le 5 juillet 1099. Gérard réunit plusieurs personnes qui s'engagèrent à soulager les chrétiens, à soigner les pauvres et défendre la Terre Sainte.

Quatre ans plus tard, devenus plus nombreux et disposant de plus de ressources, les hospitaliers ne se contentèrent plus de soigner les pèlerins ; ils les escortèrent pour les défendre contre les schismatiques et les musulmans.

— Privilèges
En peu d'années, l'Institut des Hospitaliers avait rendu tant de services qu'il fut confirmé en 1113 par Pascal II..., qui le mit pour toujours sous le patronage immédiat du Saint-Siège. Cette haute et sage direction.... en fit pendant des siècles le rempart le plus puissant de l'Europe chrétienne contre la barbarie musulmane, le meilleur protecteur des populations ouvrières contre les bandes pillardes, le fondateur et le directeur d'innombrables hôpitaux, véritables maisons de retraites pour les vieux, les infirmes et les malades.... Aussi les papes, les princes catholiques, les dévots chrétiens s'empressèrent-ils, dès sa première institution, de le combler de rentes, de possessions, de juridictions, de privilèges et d'exemptions. (Le plus ancien titre donné en sa faveur est la charte de Richard Cœur de Lion en 1194).

— Hiérarchies
Le grand-maitre prit le titre, gardé par ses successeurs, de « Serviteur des pauvres de Jésus-Christ et gardien de l'hôpital du Saint-Sépulcre de Jérusalem. » Il traitait de pair avec les chefs d'Etat, qui lui envoyaient des ambassadeurs et recevaient les siens.

L'Ordre est divisé en trois classes
1° les chevaliers, nobles, astreints au service militaire en temps de guerre et aux œuvres charitables en temps de paix.
2° les chapelains, frères ou religieux, prêtres chargés du service religieux dans les possessions de l'Ordre.
3° les frères servants, non nobles, rarement promus aux dignités réservées d'ordinaire aux chevaliers et aux chapelains.

Il y avait encore des frères ou religieux d'Obédience étrangers à l'Ordre et qui pouvaient être admis aux bénéfices et aux cures, et aussi les femmes (des veuves ordinairement) affectées dans les hôpitaux aux soins des personnes de leur sexe.
On ne rentrait dans l'Ordre qu'à 16 ans accomplis (sous Charles IX, 16 pages du Grand-Maître furent admis à 12 ans).
Tous les membres de l'Ordre doivent prêter serment de trois vœux : pauvreté, chasteté, obéissance.

Tous les Hospitaliers portaient la robe noire ou manteau noir à capuchon et à croix blanche (sur la poitrine pour la robe et sur le cœur pour le manteau). Ils se distinguaient ainsi des Templiers à manteau blanc orné d'une croix rouge. A la guerre, les chevaliers pouvaient porter pour se, distinguer des servants, une « cotte d'armes rouge » à croix blanche. Mais en dehors de la guerre, le port de l'habit noir, qui leur promettait, au jour de leur profession « pain et eau, vêtement pauvre, travail et peine chaque jour ! » était obligatoire.

— Les Langues
L'Ordre de Malte était composé des différentes nations chrétiennes européennes qu'on appelait langues, portées progressivement au nombre de 8. On en comptait 3 pour la France : Celle de Provence, celle d'Auvergne, celle de France. La langue de Provence, dite « Vénérable langue », la plus ancienne d'Europe, conserva toujours le pas sur les autres et son chef eut la charge de grand commandeur, qui résidait à Malte (14).
Pour assurer l'ordre, les langues furent divisées en Grands Prieurés, renfermant chacun les prieurés ou établissements formés dans ses limites (24).
Pour la France, il faut retenir
1. Saint-Gilles.
2. Toulouse, de la langue de Provence.
3. Auvergne, de la langue d'Auvergne.
4. France.
5. Aquitaine.
6. Champagne, de la langue de France.

Le plus important et le plus ancien de ces prieurés fut celui de Saint-Gilles en Provence. Un lieutenant du prieur de Jérusalem y résidait. Après la suppression de l'Ordre des Templiers en 1313, il fut divisé en deux et une partie des territoires placés sous sa juridiction passèrent au Grand Prieuré de Toulouse (1317) qui engloba le Haut-Languedoc, la Guyenne, la Gascogne, la Bigorre, la Biscaye et le Comté de Foix. Ce dernier comprenait 28 Commanderies chefs, réparties dans 10 départements actuels. Le Gers ne comprenait que La Cavalerie de Goutz.

— Commanderies
Les prieurés étaient divisés en Commanderies d'importance fort inégale. A l'origine, le Commandeur n'était qu'un administrateur, mais, plus tard, il fut le vrai seigneur, sans traitement, mais intéressé à faire valoir ses terres et à mériter, par une bonne gestion, d'être promu dans un poste plus avantageux. Nommé par le Grand-Maître, il devait être changé tous les cinq ans, mais il pouvait être maintenu — le cas était fréquent — après agrément des supérieurs.
Les réparations des immeubles et frais d'entretien étaient à la charge du commandeur, qui devait aussi fournir le mobilier, l'outillage et le bétail d'exploitation.

— L'Ordre de Malte en France au XVIIIe siècle
Au XVIIIe siècle, avant sa dissolution, l'Ordre de Malte possédait en France 245 Commanderies, composées chacune de plusieurs membres.
Le premier ordre comprenait : 6 grands prieurés, 6 commanderies magistrales et 4 dignités capitulaires.
Dans le deuxième ordre rentraient 196 commanderies réservées aux chevaliers.
Le troisième ordre partage des prêtres conventuels et des frères servants, comprenait 33 subalternes.
En 1777, le total des revenus était, selon l'estimation du chapitre de l'Ordre d'environ trois millions, représentant le produit des terres et maisons.

Le quart de cette somme était absorbé par les gages des régisseurs, les salaires des valets, les réparations et reconstructions des bâtiments, l'entretien des églises, les honoraires des curés et vicaires, les frais de justice, le renouvellement des terriers. Un autre quart fournissait les « responsions » auxquelles était taxé tout Commandeur en faveur du trésor commun. Sur cette dernière somme, 300.000 francs étaient versés au roi... de sorte que le trésor de l'Ordre ne recevait, toutes déductions faites, que 450 mille livres, légère contribution de la France aux dépenses occasionnées par la garde des côtes, la protection donnée à la marine marchande et l'entretien des hôpitaux ouverts à toutes les nations. 1.500.000 livres restaient en proportions inégales aux 245 Commanderies, en moyenne de 6 à 8.000 livres (11).
Sources : Charles Cadéot. Bulletin de la Société archéologique, historique littéraire et scientifique du Gers, page 388 à 402. 4e trimestre. Auch 1955. BNF

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